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sultes, etc. (On trouve le catalogue chez le gardien.)

Un peu en avant se dresse une statue colossale, une Bavaria de quatre-vingt-dix pieds, debout au sommet d’un de ces grands escaliers si tristes qui montent à découvert dans la verdure des jardins publics. Avec sa peau de lion sur les épaules, son glaive serré dans une main (toujours la gloire !), cette immense pièce de bronze, à l’heure où je la vis, sur la fin d’une de ces journées d’août où les ombres s’allongent démesurément, remplissait la plaine silencieuse de son geste emphatique. Tout autour, le long des colonnes, les profils des hommes célèbres grimaçaient au soleil couchant. Tout cela si désert, si morne ! En entendant mes pas sonner sur les dalles, je retrouvais bien cette impression de grandeur dans le vide qui me poursuivait depuis mon arrivée à Munich.

Un petit escalier en fonte grimpe en tournant dans l’intérieur de la Bavaria. J’eus la fantaisie de monter jusqu’en haut et de m’asseoir un moment dans la tête du colosse, un petit salon en rotonde éclairé par deux fenêtres qui sont les yeux. Malgré ces yeux ouverts sur l’horizon bleu des Alpes, il faisait très chaud là-dedans. Le bronze, chauffé par le soleil, m’enveloppait d’une chaleur alourdissante. Je