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Pavillons de tous les pays, russes, grecs, suédois, tunisiens, américains… Les navires au ras du quai, les beauprés arrivant sur la berge comme des rangées de baïonnettes. Au-dessous les naïades, les déesses, les saintes vierges et autres, sculptures de bois peint qui donnent le nom au vaisseau ; tout cela mangé par l’eau de mer, dévoré, ruisselant, moisi… De temps en temps, entre les navires, un morceau de mer, comme une grande moire tachée d’huile… Dans l’enchevêtrement des vergues, des nuées de mouettes faisant de jolies taches sur le ciel bleu, des mousses qui s’appelaient dans toutes les langues.

Sur le quai, au milieu des ruisseaux qui venaient des savonneries, verts, épais, noirâtres, chargés d’huile et de soude, tout un peuple de douaniers, de commissionnaires, de portefaix avec leurs bogheys attelés de petits chevaux corses.