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privilége de leur inspirer, si bien que l’administration civile a été obligée de coiffer tout son monde avec des képis, depuis le cantonnier jusqu’au receveur de l’enregistrement. En somme, pour gouverner l’Algérie — c’est toujours le prince qui parle — pas n’est besoin d’une forte tête, ni même de tête du tout. Il suffit d’un képi, d’un beau képi galonné reluisant au bout d’une trique, comme la toque de Gessler.

Ainsi causant et philosophant, la caravane allait son train. Les portefaix — pieds nus — sautaient de roche en roche avec des cris de singes. Les caisses d’armes sonnaient. Les fusils flambaient. Les indigènes qui passaient s’inclinaient jusqu’à terre devant le képi magique… Là-haut, sur les remparts de Milianah, le chef du bureau arabe, qui se promenait au bon frais avec sa dame, entendant ces bruits insolites, et voyant des