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bon temps pour moi, le temps de la jeunesse ! Il fallait me voir partir le matin, lavée à grande eau et toute luisante avec mes roues vernissées à neuf, mes lanternes qui semblaient deux soleils et ma bâche toujours frottée d’huile ! C’est ça qui était beau quand le postillon faisait claquer son fouet sur l’air de : Lagadigadeou, la Tarasque, la Tarasque ! et que le conducteur, son piston en bandoulière, sa casquette brodée sur l’oreille, jetant d’un tour de bras son petit chien, toujours furieux, sur la bâche de l’impériale, s’élançait lui-même là-haut, en criant : « Allume ! allume ! » Alors mes quatre chevaux s’ébranlaient au bruit des grelots, des aboiements, des fanfares, les fenêtres s’ouvraient, et tout Tarascon regardait avec orgueil la diligence détaler sur la grande route royale.

Quelle belle route, monsieur Tartarin, large, bien entretenue, avec ses bornes kilo-