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Saint-Mandé, que se décidât le sort de la race royale d’Illyrie.

— Eh bien ?… demanda Christian II, s’allongeant pour atteindre la bille.

— Eh bien ! monseigneur…

Il attendit que le roi eût fait son carambolage, que le conseiller Boscovich l’eût dévotement marqué, pour continuer avec une nuance d’embarras :

— … Le peuple d’Illyrie est comme tous les peuples, sire. Il aime le succès, la force, et je crains bien que la fatale issue de nos dernières entreprises…

Le roi se retourna, une rougeur aux joues :

— Je vous ai demandé la vérité, mon cher… Inutile de me l’affubler de tout ce papier à papillottes.

— Sire, il faut abdiquer… dit le Gascon brutalement.

Christian le regarda avec stupeur.

— Abdiquer quoi ?… Je n’ai rien… Un beau cadeau que je ferais là à mon fils !… Je crois qu’il aimerait mieux un vélocipède neuf que cette vague promesse de couronne à sa majorité.

Méraut cita l’exemple de la reine de Galice. Elle aussi avait abdiqué pour son fils pendant l’exil ; et si don Léonce était sur le trône aujourd’hui, c’est bien à cette abdication qu’il le devait.