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monde ouaté, discret, qui ferme à grand renfort de rideaux tombants ses salons au jour et au bruit de la rue et ne fait parler de lui que de temps à autre, par une mort, un procès en séparation, ou l’excentrique aventure d’un de ses membres, héros du « Persil » et de la Gomme. Parmi ce choix, quelques nobles familles illyriennes, ayant suivi leurs princes en exil, beaux types d’hommes et de femmes, un peu trop accentués, trop exotiques, dans ce milieu raffiné ; puis, groupés à de certains points apparents, les salons académiques qui longtemps d’avance préparent les élections, pointent les voix, et dont la fréquentation vaut mieux pour un candidat que son pesant de génie. D’illustres décavés de l’Empire se faufilent dans ces « vieux partis » pour lesquels ils ont épuisé jadis leurs ironies de parvenus ; et même, si triée que soit l’assemblée, quelques grignoteuses « des premières », célèbres par leurs attaches monarchiques, s’y sont glissées en toilettes simples, avec deux ou trois actrices à la mode, frimousses connues de tout Paris, visions d’autant plus banales et obsédantes que d’autres femmes, et de tous les mondes, s’ingénient à les copier. Et puis les journalistes, des reporters de feuilles étrangères, armés de buvards, de porte-crayons perfectionnés, outillés de pied en cap comme pour un voyage au centre de l’Afrique.