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LES ROIS EN EXIL

reine comme lectrice et dame d’honneur la princesse ici présente ?…

— C’est accordé pour ma part, duc, dit la reine en tournant son beau sourire vers Colette, tout éblouie de sa nouvelle dignité.

Quant au prince, il eut pour remercier son souverain, qui lui octroyait un brevet d’aide de camp avec la même bonne grâce, un gracieux hennissement dont il avait pris l’habitude à force de vivre au Tattersall.

— Je présenterai les trois nominations demain matin à la signature, ajouta le général d’un ton respectueux mais bref, indiquant qu’il se considérait déjà comme entré en fonctions.

En entendant cette voix, cette formule qui l’avaient si longtemps et si solennellement poursuivi, le jeune roi laissa voir sur sa figure une expression de découragement et d’ennui, puis il se consola en regardant la princesse que le bonheur embellissait, transfigurait, comme il arrive à ces mignons visages sans traits qui sont tous dans le voile piquant et déplacé sans cesse de leur physionomie. Songez ! dame d’honneur de la reine Frédérique, elle, Colette Sauvadon, la nièce à Sauvadon, le gros marchand de vins de Bercy ! Qu’est-ce qu’on dirait rue de Varennes, rue Saint-Dominique, dans ces salons si exclusifs où son mariage avec Herbert de Rosen l’avait fait admettre aux grands jours, mais jamais dans l’intimité ! Déjà sa petite ima-