Page:Daudet – Les Rois en exil – Éditons Lemerre.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pied qui se disposait à les suivre reprit sa place sur le siège, et l’on convint que la voiture attendrait. Bien sûr, ils ne comptaient pas faire toute la foire, seulement quelques pas devant les première baraques.

C’étaient, à l’entrée, de petits établis volants, une table recouverte d’une serviette blanche, des tirs au lapin, des tourniquets. Les gens. passaient, dédaigneux, sans s’arrêter. Puis des fritureries en plein vent, entourées d’une odeur âcre de graisse brûlée, de grandes flammes montant roses dans le jour, autour desquelles s’activaient des marmitons vêtus de blanc derrière des piles de beignets sucrés. Et le fabricant de pâte de guimauve, allongeant, tordant en gigantesques anneaux la pâte blanche qui sent l’amande !… Le petit prince regardait avec stupeur. Cela était si nouveau pour lui, oiseau de volière, élevé dans les hautes chambres d’un château, derrière les grilles dorées d’un parc, et grandi au milieu des terreurs, des méfiances, ne sortant qu’accompagné, n’ayant jamais vu le populaire que du haut d’un balcon ou d’une voiture entourée de gardes. D’abord intimidé, il marchait serré contre sa mère en lui tenant la main très fort ; mais peu à peu il se grisait au bruit, à l’odeur de la fête. Les ritournelles des orgues l’excitaient. Il y avait une envie folle de courir dans la façon dont il entraînait Frédérique, combattu par le besoin