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LES ROIS EN EXIL

l’escalier tournant, à rampe ouvragée et pomme de cristal, qui fait communiquer les deux étages. Voilà l’objet demandé, garanti, étiqueté J. T. L. Et ne vous gênez pas, mon prince, si celui-là ne vous plaît pas, on peut vous le changer. Les caves de l’agence sont bien fournies. C’est un peu plus cher que partout ailleurs, le double et le triple seulement ; mais cela ne vaut-il pas mieux que de courir les magasins où l’on ne comprend pas un mot de ce que vous dites, malgré la promesse de l’enseigne « english spoken » ou « man spricht deutsch », ces magasins du boulevard, où l’étranger entouré, circonvenu, ne trouve jamais que les fonds de boîtes, les soldes, les rossignols, ce rebut de Paris, ce déficit du livre de caisse, « l’objet qui n’est plus à la mode », la devanture de l’an passé ternie plus encore par sa date que par la poussière ou le soleil de l’étalage ! Oh ! le boutiquier parisien, obséquieux et gouailleur, dédaigneux et collant, c’est fini, l’étranger n’en veut plus. Il se lasse à la fin d’être aussi férocement exploité, et non seulement par le boutiquier, mais par l’hôtel où il couche, par le restaurant où il mange, le fiacre qu’il hèle dans la rue, le marchand de billets qui l’envoie bâiller dans des théâtres vides. Au moins à la maison Lévis, dans cette ingénieuse agence des étrangers où l’on trouve tout ce qu’on désire, vous êtes sûr