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apporté à l’histoire du cinéma canadien une technique fraîche ; Le Curé de Village lui donne son premier véritable scénario… Oui maintenant, on le sent, le cinéma canadien va exister. » Pour certains autres le film n’avait pas les mêmes attraits ; Pierre Gascon, alors au Photo-Journal, écrivait : « Le grand défaut de ce film est son scénario qui est plus radiophonique que cinématographique… » Son collègue de Radiomonde était encore moins indulgent qui affirmait sans ambages : « Le Curé de Village, en vérité, est un court métrage étiré, pour les besoins du commerce, à 88 minutes… » Cet enthousiasme mitigé se fit sentir au chapitre des recettes qui accusèrent un net recul sur celles de Un Homme et son péché et de La Forteresse. Le Curé de Village n’en gagna pourtant pas moins le Grand Prix du second Palmarès du film canadien ; au même Palmarès, un jeune montréalais, Claude Jutra, remportait le prix de la section « amateur » pour son court métrage Mouvement perpétuel ; Réal Benoit et André de Tonnancour recevaient une mention spéciale pour Artistes primitifs d’Haïti.

Le 17 février 1950 c’était au tour de Séraphin de connaître les fastes d’une grande première. Malheureusement l’enthousiasme est à la baisse : Variety, le grand journal américain du spectacle, est d’accord avec le Montreal Herald pour trouver la nouvelle production moins intéressante que Un Homme et son péché. Jean Vincent, au Devoir, attaque le film par le biais de l’ironie, alors que Jacques Giraldeau, vite revenu de son emballement pour le cinéma autochtone, écrit : « L’infantilisme dans lequel se vautre Séraphin ne saurait mériter les éloges restrictifs mais pleins d’espoirs qu’a reçus Un Homme et son péché. Ce dernier film de Ouébec Productions possède tous les défauts d’un bon film et toutes les qualités d’un navet. » Pris à parti par les publicistes de Québec Productions, Giraldeau fit appel à ses lecteurs qui endossèrent son jugement avec force. Néanmoins, et malgré cette « incompréhension » de la critique, le film continua sa carrière et en avril on annonçait que 75% du coût de production était déjà recouvré. Séraphin fut par la suite distribué dans les villes françaises de la Nouvelle-Angleterre et on parla même de faire une version « française » pour lancer le film a Paris !