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L’ÉMANCIPATION DE LA FEMME

Je ne puis essayer de répondre complétement à cette objection en quelques mots ; s’il y a pourtant un motif sur lequel j’appuierais de préférence la motion de l’émancipation des femmes, ce serait celui de l’influence qu’elle exercerait, à mon avis, sur la vie domestique. Il me semble que l’expérience est entièrement en notre faveur pour cette partie de la question ; si nous regardons dans le passé, et si nous comparons d’autres pays au nôtre, nous trouverons que les femmes les plus complètement élevées en vue du mariage et des devoirs domestiques sont moins propres à accomplir ces devoirs spéciaux, et c’est en parfaite analogie avec d’autres cas. Vous ne pouvez espérer rendre quelqu’un propre à une profession spéciale en l’élevant exclusivement en vue de cette profession ; mais vous pensez qu’il agira mieux dans ses affaires particulières s’il a une éducation étendue et générale ; il en est de même pour le mariage. Je ne doute pas que les femmes ne soient meilleures épouses et meilleures mères si elles avaient d’autres intérêts en dehors de leurs intérêts domestiques, et qu’elles ne soient plus propres à élever leurs enfants si elles étaient elles-mêmes intéressées aux questions politiques du jour. Je suis sûr, par exemple, que si l’on voulait se donner la peine de comparer le continent à l’Angleterre, on ne pourrait dire que les femmes du continent européen, qui sont tenues dans les limites beaucoup plus étroites, et élevées spécialement en vue du mariage, sont, sous aucun rapport, meilleures épouses et mères que celles de notre pays, qui vivent avec plus de liberté et ont des intérêts beaucoup plus étendus. Je dois faire remarquer que nos adversaires sont très-inconséquents sur cette partie du sujet pendant qu’ils sont si effrayés de voir les femmes enlevées à leurs devoirs d’intérieur par la vie politique, ils ne le sont nullement de les en voir détournées par d’autres occupations ; une femme peut donner son temps à tous les genres de travaux qui apportent d’immenses obstacles à la vie et aux devoirs domestiques ; elle peut passer ses journées de la manière si admirablement décrite par M. Robert Anstruther ; elle peut dépenser selon ses désirs son temps à sa beauté, à