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de son rang. Elle fut mère sublime, épouse admirable ; elle porta sur l’échafaud sa noble et innocente tête, et marcha à la mort la palme du martyre à la main. De quelque opinion qu’on soit, ce martyre doit rendre sacrée la mémoire de notre dernière reine. Les femmes surtout doivent se taire et déplorer cette infortune si auguste et si complète. L’injure, en ce cas, est plus qu’une lâcheté, c’est un sacrilège.

Aux jours dont nous parlons, la gaieté animait sa physionomie imposante. Debout près de la cheminée de son cabinet, elle recevait, avec un charmant sourire, ceux qu’elle appelait ses amis. Cette intimité tant calomniée était prise dans les personnes les plus distinguées de l’époque. Elle savait trouver pour chacun le mot agréable ; elle connaissait leur famille, leurs espérances ; elle voulait que tout le monde fût heureux, et répandait le bonheur autour d’elle, autant que sa position parfaitement dépendante lui permettait de le faire. En apercevant madame de Vaujour, elle lui dit joyeusement :

— Eh bien ! vous voilà donc, belle sauvage ! M. de Sainte-Même vous confie à nous. J’en suis fière, en vérité. Il garde trop bien son trésor ; c’est de l’avarice. Bonjour, mademoiselle Aurore, fraîche comme votre patronne. Avez-vous pris son costume pour notre bal ? Vous n’en pourriez choisir aucun qui vous allât mieux.

Les carrosses étaient prêts ; on y monta au bas de