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EXCURSION A BATHURST.

route, par le plan qui a présidé à sa formation, par la façon dont elle a été exécutée, peut se comparer aux plus belles routes qui soient en Europe. Nous pénétrons alors dans un pays moins élevé d’un millier de pieds environ ; les rochers sont actuellement en granite, et, grâce à ce changement, la végétation est plus belle. Les arbres sont plus éloignés les uns des autres et les pâturages beaucoup plus verts et beaucoup plus abondants. À Hassan Walls, je quitte la grande route ; je fais un court détour pour me rendre à la ferme de Walerawang afin de remettre une lettre que l’on m’a donnée à Sydney pour le chef de l’établissement. M. Browne m’invite à passer quelques jours avec lui, invitation que j’accepte avec beaucoup de plaisir. Cette ferme, ou plutôt cet établissement pour l’élevage des moutons, est une des plus intéressantes de la colonie. On y trouve cependant plus de bestiaux et de chevaux qu’il n’y en a d’ordinaire dans ces fermes, cela provient de ce que quelques-unes des vallées sont marécageuses et que les pâturages y sont un peu plus grossiers. Près des bâtiments d’habitation on a défriché une certaine quantité de terrain pour y cultiver du blé ; on faisait la moisson au moment de ma visite, toutefois on ne cultive en blé que ce qui est absolument nécessaire pour les besoins des ouvriers de la ferme. Il y a toujours ici environ quarante convicts comme travailleurs, actuellement il y en a un peu plus. Bien qu’on trouve dans cette ferme tout ce qui est nécessaire, elle ne paraît pas être une résidence confortable, cela tient peut être à ce qu’il n’y a pas une seule femme. La soirée d’un beau jour donne ordinairement à tout ce qui est campagne un air de bonheur tranquille ; mais ici, dans cette ferme isolée, les teintes les plus brillantes des bois environnants ne peuvent me faire oublier que je me trouve au milieu de quarante coquins ; ils viennent de cesser leurs travaux. On peut comparer ces hommes à des nègres, mais sans pouvoir éprouver pour eux la compassion qu’on ressent pour ces derniers.

Le lendemain matin, M. Archer, le sous-directeur, a la bonté de me conduire à la chasse au kangourou. Nous passons la plus grande partie de la journée à cheval, mais sans beaucoup de succès, car nous ne voyons ni un kangourou, ni même un chien sauvage. Nos lévriers poursuivent un rat kangourou qui se réfugie dans un arbre creux, où nous allons le prendre ; cet animal a la taille du lapin, mais il ressemble au kangourou. Il y a quelques années, le gibier sauvage abondait dans ce pays, mais actuellement il faut aller fort loin pour trouver l’émeu et le kangourou devient fort rare ; ces deux