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CHILI SEPTENTRIONAL.

tumé à voyager dans la Cordillère, il pensait pouvoir se rendre facilement à Copiapó ; mais bientôt il se perdit dans un labyrinthe de montagnes d’où il ne parvint pas à sortir. Quelques-unes de ses mules étaient tombées dans des précipices et il avait beaucoup souffert. Ne sachant pas où se procurer de l’eau dans ce pays plat, il avait été obligé de rester auprès des chaînes centrales.

Nous descendons la vallée, et, le 22, nous arrivons à Copiapó. La vallée s’élargit dans sa partie inférieure et forme une belle plaine qui ressemble à celle de Quillota. La ville couvre une étendue de terrain considérable, car chaque maison est entourée d’un jardin. Mais, en somme, c’est une ville désagréable. Chacun semble n’avoir qu’un but, gagner de l’argent et s’en aller le plus vite possible. Presque tous les habitants s’occupent de mines ; aussi n’entend-on parler que de mines et de minerais. Les objets de première nécessité sont tous fort chers, ce qui s’explique, car la ville est située à 18 lieues du port et les transports par terre sont très-dispendieux. Un poulet coûte 6 ou 7 francs ; la viande est aussi chère qu’en Angleterre ; on doit apporter le bois à brûler de la Cordillère, c’est-à-dire un voyage de deux ou trois journées ; le droit de pâturage pour un animal se paye 1 fr. 23 par jour. Ce sont là des prix exorbitants pour l’Amérique méridionale.

26 juin. — Je loue un guide et huit mules pour aller faire une excursion dans la Cordillère, par une route différente de celles que j’ai déjà suivies. Comme nous devons traverser une région absolument déserte, nous emportons une quantité d’orge mêlée à de la paille hachée pour la nourriture de nos mules. À environ 2 lieues de la ville s’ouvre, dans la vallée que nous avons déjà parcourue, une large vallée qui porte le nom de Despoblado, ou inhabitée. Bien que cette vallée soit considérable et qu’elle conduise à une passe qui traverse la Cordillère, elle est absolument dépourvue d’eau, sauf peut-être pendant les hivers extraordinairement pluvieux. C’est à peine si l’on trouve un ravin sur le flanc des montagnes, et le fond de la principale vallée, formé de galets, est uni et presque de niveau. Il est probable qu’aucun torrent considérable n’a jamais coulé dans cette vallée, car autrement on y trouverait certainement, comme dans toutes les vallées méridionales, un canal central bordé de chaque côté par des falaises. Je suis porté à croire que cette vallée, comme toutes celles dont parlent les voyageurs qui ont visité le Pérou, a été laissée en l’état où