Page:Darwin - Voyage d’un naturaliste autour du monde, trad. Barbier, 1875.djvu/384

Cette page a été validée par deux contributeurs.
368
CHILI SEPTENTRIONAL.

terrasses affectant la forme de degrés, remarquées d’abord par le capitaine B. Hall, et qui, selon M. Lyell, ont été formées par la mer pendant l’élévation successive du sol. C’est là, certainement, l’explication vraie de cette singulière formation ; j’ai trouvé, en effet, sur ces terrasses de nombreux coquillages appartenant à des espèces actuellement existantes. Cinq terrasses étroites, doucement inclinées, s’élèvent l’une derrière l’autre ; elles sont formées de galets là où elles sont le mieux développées ; elles font face à la baie et s’élèvent des deux côtés de la vallée. À Guasco, au nord de Coquimbo, le même phénomène se répète, mais sur une échelle beaucoup plus considérable, de façon même à étonner quelques-uns des habitants. Là, les terrasses sont beaucoup plus considérables, et on pourrait leur donner le nom de plaines ; dans quelques endroits, il y en a six, mais plus ordinairement cinq seulement, et elles s’étendent dans la vallée, jusqu’à une distance de 37 milles de la côte. Ces terrasses en degrés ressemblent absolument à celles de la vallée de Santa Cruz et aux terrasses beaucoup plus considérables qui bordent toute la côte de la Patagonie, sauf toutefois qu’elles sont beaucoup plus petites que ces dernières. Elles ont été, sans aucun doute, formées par l’action dévastatrice des eaux de la mer pendant de longs intervalles de repos dans le soulèvement graduel du continent.

Des coquillages appartenant à beaucoup d’espèces existantes non-seulement reposent à la surface des terrasses à Coquimbo, à une hauteur de 250 pieds, mais sont aussi enfouies dans un roc calcaire friable, qui, en quelques endroits, atteint une épaisseur de 20 à 30 pieds, mais qui a peu d’étendue. Ces couches modernes reposent sur d’anciennes formations tertiaires contenant des coquillages appartenant à des espèces qui toutes paraissent éteintes. Bien que j’aie examiné tant de centaines de milles des côtes du continent et sur le Pacifique et sur l’Atlantique, je n’ai trouvé des couches régulières contenant des coquillages marins appartenant à des espèces récentes qu’en cet endroit et un peu plus au nord, sur la route de Guasco. Ce fait me semble singulièrement remarquable, car l’explication que donnent ordinairement les géologues pour indiquer l’absence, dans un district, de dépôts fossilifères stratifiés d’une période donnée, c’est-à-dire que la surface existait alors à l’état de terre sèche, ne peut s’appliquer ici. Les coquillages épars à la surface ou enfouis dans du sable mou ou de la terre, nous prouvent, en effet, que les terrains qui forment les