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sont insensibles à des objets fort tranchants, et avalent même des épines de rose et de petits éclats de verre. Il est donc permis de douter que les extrémités effilées des feuilles servent à leur indiquer que ce n’est pas le bon côté à saisir ; pour le prouver, on coupa les pointes de beaucoup de feuilles sur une longueur d’environ un pouce, et cinquante-sept de ces feuilles ainsi défigurées furent traînées dans les galeries par la base, et pas une par les extrémités tronquées. Les vers en réclusion prennent souvent les feuilles de pin près du milieu et les traînent vers l’ouverture de leurs galeries ; l’un d’eux s’efforça d’une façon stupide à les pousser dans la galerie en les faisant plier. Parfois au-dessus de leurs galeries (comme dans le cas précédemment cité des feuilles de tilleul), ils amassaient beaucoup plus de feuilles qu’ils n’en pouvaient faire entrer à l’intérieur. Dans d’autres cas, cependant, ils agirent tout différemment ; car dès qu’ils sentaient la base d’une feuille de pin, ils la saisissaient, l’englobant parfois complètement dans la bouche, ou bien ils saisissaient un point rapproché de la base, et la feuille était alors rapidement entraînée ou plutôt lancée par secousses dans leur galerie. Il nous sembla, à mon fils et à moi, que les vers s’apercevaient immédiatement quand ils avaient saisi une feuille de la façon convenable. Nous observâmes neuf cas de ce genre, mais dans l’un d’eux le ver ne réussit pas à faire entrer dans la galerie la feuille, celle-ci s’étant enchevêtrée dans d’autres feuilles à côté. Dans un autre cas, une feuille était placée presque perpendiculairement