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verte de gravier, dans mon jardin, j’ai trouvé bien des centaines de feuilles d’une espèce de pin (Pinus austriaca ou nigricans) entraînées par la base à l’intérieur des galeries. La surface par laquelle ces feuilles s’articulent avec les branches a une forme aussi spéciale que la jointure entre les os de la jambe d’un quadrupède ; si cette surface avait été rongée le moins du monde, cela aurait été immédiatement visible, mais il n’y en avait pas trace. Il s’en faut que toutes les feuilles de dicotylédones ordinaires qui sont traînées dans les galeries soient rongées par les vers. J’ai vu jusqu’à neuf feuilles de tilleul dans la même galerie, et toutes étaient loin d’avoir été rongées ; mais ces feuilles servent peut-être de réserve pour les besoins ultérieurs. Là où il y a abondance de feuilles tombées, il y en a beaucoup plus d’entassées que de besoin au-dessus de l’ouverture d’une galerie, de sorte qu’il reste une petite pile de feuilles non employées, recouvrant comme un toit celles qui ont été en partie rentrées à l’intérieur.

Tirée à une certaine profondeur dans une galerie cylindrique, une feuille ne peut manquer d’être fort plissée et chiffonnée. Quand une seconde feuille est amenée à son tour, elle l’est extérieurement à la première et ainsi de suite pour les feuilles suivantes ; et à la fin toutes sont plissées et serrées exactement l’une contre l’autre. Quelquefois les vers élargissent l’ouverture de leur galerie, ou en font une nouvelle tout à côté, de manière à rentrer encore plus de feuilles. Souvent ou même en général, ils comblent les interstices entre les