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vivent principalement de feuilles à demi gâtées ; et celles-ci ne pourraient pas les nourrir s’ils ne pouvaient digérer la cellulose qui forme les parois des cellules ; car c’est un fait bien connu que, peu de temps avant la chute des feuilles, presque toutes les autres substances nutritives ont presque complètement disparu de leur intérieur. On a du reste acquis aujourd’hui la certitude que la cellulose qui n’est point modifiée du tout ou ne l’est que très peu par le suc gastrique des animaux supérieurs, est attaquée par la sécrétion du pancréas[1].

Les feuilles à demi gâtées ou fraîches que les vers se proposent de dévorer, sont traînées par eux à l’intérieur de leurs galeries jusqu’à une profondeur de un à trois pouces, et elles sont alors humectées d’un liquide qu’ils sécrètent. On avait supposé que ce fluide servait à hâter leur décomposition ; mais un grand nombre de feuilles furent à deux reprises retirées des galeries des vers et tenues pendant de longues semaines dans un atmosphère très humide, sous une cloche de verre dans mon cabinet d’étude, et les parties qui avaient été humectées par les vers ne se décomposèrent pas notablement plus vite que les autres parties. Quand on donnait le soir des feuilles fraîches aux vers tenus renfermés et qu’on examinait celles-ci le matin suivant, par conséquent peu d’heures après qu’elles avaient été traînées dans les galeries, le fluide dont les feuilles étaient humectées montrait une réac-

  1. Schmulewitsch, Action des sucs digestifs sur la cellulose. Bull. de l’Acad. imp. de St-Pétersbourg, t. XXV, p. 549, 1879.