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remarque M. Fabre, aurait servi tout aussi bien. De même encore, quand on retire d’une cellule la proie paralysée avec l’œuf qui y est attaché, le sphex, après être entré dans la cellule et l’avoir trouvée vide, ne la ferme pas moins avec le soin habituel. Les abeilles essaient pendant des heures entières de s’échapper par une fenêtre et bourdonnent contre l’un des battants, tandis que l’autre est ouvert. Un brochet même continua pendant trois mois à se précipiter et se cogner contre les parois de verre d’un aquarium, essayant vainement de saisir des vairons qui étaient de l’autre côté[1]. M. Layard[2] a vu un serpent à lunettes agir beaucoup plus sagement que le brochet et le sphex ; il avait avalé un crapaud enfoncé dans un trou et ne pouvait pas dégager sa tête, il dégorgea le crapaud qui chercha à se cacher plus profondément, il l’avala de nouveau, le dégorgea encore une fois, mais alors le serpent instruit par l’expérience, saisit le crapaud par une jambe et le sortit du trou. Les animaux supérieurs même suivent souvent leurs instincts d’une façon stupide ou non appropriée au but : le tisserin s’obstine à passer des fils à travers les barreaux de sa cage, comme s’il construisait un nid : un écureuil frappe des noix sur un plancher, comme s’il venait de les enfouir dans le sol : un castor coupe des bûches de bois et les traîne de part et d’autre, bien qu’il n’y ait

  1. Möbius, die Bewegungen der Thiere. etc. (Mouvements des animaux, etc.) 1873. p. 111.
  2. Annals and Mag. of Natural History, série II, vol. IX, 1852. p. 833.