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pointue, on peut l’expliquer par la raison que quelques-uns ont été enfoncés par l’extrémité la plus large ou la plus épaisse pour épargner la besogne. Sans doute, c’est l’instinct qui amène les vers à boucher leurs galeries ; on aurait donc pu s’attendre que l’instinct les guiderait pour agir le mieux possible dans chaque cas particulier, indépendamment de l’intelligence. Nous voyons combien il est difficile de juger si l’intelligence entre en jeu ou non, car des plantes même pourraient parfois sembler être dirigées par elle, c’est, par exemple, le cas quand des feuilles déplacées dirigent de nouveau leur face supérieure vers la lumière par des mouvements extrêmement compliqués et par la voie la plus courte. Chez les animaux, des actions qui paraissent dues à l’intelligence peuvent s’accomplir grâce à une habitude transmise par l’hérédité sans que l’intelligence s’en mêle, bien qu’à l’origine cette habitude s’acquière à l’aide de l’intelligence. Ou bien il se peut que l’habitude ait été acquise par la conservation et l’hérédité de variations heureuses de quelque autre habitude ; et, dans ce cas, la nouvelle habitude aura été acquise indépendamment de l’intelligence, dans tout le cours de son développement. Il n’est donc pas improbable a priori que les vers aient acquis des instincts spéciaux par l’une ou l’autre de ces deux dernières voies. Néanmoins, il est impossible de croire que des instincts se soient développés au sujet d’objets qui, comme les feuilles ou les pétioles de plantes étrangères, étaient absolument inconnus aux parents des vers qui agissent de la façon indiquée. Et