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à ma connaissance. Ces accidents sont dus à l’introduction dans la cavité de petits corps durs, tels que des graines qui, par leur présence, déterminent une inflammation[1].

Quelques quadrumanes, les Lémurides et surtout les Carnivores aussi bien que beaucoup de Marsupiaux, ont, près de l’extrémité inférieure de l’humérus, une ouverture, le foramen supra-condyloïde, au travers de laquelle passe le grand nerf de l’avant-bras et souvent son artère principale. Or l’humérus de l’homme porte ordinairement des traces de ce passage, qui est même quelquefois assez bien développé ; il est formé par une apophyse recourbée, complétée par un ligament. Le Dr Struthers[2], qui s’est beaucoup occupé de cette question, vient de démontrer que ce caractère est parfois héréditaire, car il l’a observé chez un individu et chez quatre de ses sept enfants. Lorsque ce passage existe, le nerf du bras le traverse toujours ; ce qui indique clairement qu’il est l’homologue et le rudiment de l’orifice supra-condyloïde des animaux inférieurs. Le professeur Turner estime que ce cas s’observe sur environ 1 p. 100 des squelettes récents. Si le développement accidentel de cette conformation chez l’homme est, comme cela semble probable, dû à un effet de retour, cette conformation nous reporte à un ancêtre extrêmement reculé, car elle n’existe pas chez les quadrumanes supérieurs.

Il existe une autre perforation de l’humérus, qu’on peut appeler l’intra-condyloïde, qui s’observe chez divers genres d’anthropoïdes et autres singes[3], ainsi que chez beaucoup d’animaux inférieurs et qui se présente quelquefois chez l’homme. Fait très remarquable, ce passage paraît avoir existé beaucoup plus fréquemment autrefois qu’à une époque plus récente. M. Busk[4] a réuni les documents suivants à ce sujet : « Le professeur Broca a remarqué cette perforation sur 4½ p. 100 des os du bras recueillis dans le cimetière

  1. M. C. Martins, De l’Unité organique, Revue des Deux-Mondes, 15 juin 1862, p. 16 ; Hæckel, Generelle Morphologie, vol. II, p. 278, ont tous deux fait des remarques sur le fait singulier que cet organe rudimentaire cause quelquefois la mort.
  2. Voir pour l’hérédité le docteur Struthers, the Lancet, 24 janvier 1863, p. 83, et 15 février 1873. Le docteur Knox, Great artists and anatomists, p. 63, est, m’a-t-on dit, le premier anatomiste qui ait appelé l’attention sur cette conformation particulière chez l’homme. Docteur Gruber, Bulletin de l’Acad. imp. de Saint-Pétersbourg, 1867. p. 448.
  3. M. Saint-George Mivart, Trans. Philos. Soc., 1867, p. 310.
  4. On the caves of Gibraltar (Transact. Internat. Congress of Prehist. Arch., 3e  session, 1869, p. 159). Le professeur Wyman a récemment démontré (Fourth annual Report, Peabody museum, 1871, p. 20) que cette perforation existe chez 31 p. 100 de certains restes humains provenant des antiques tertres de l’ouest des États-Unis et de la Floride. On la rencontre fréquemment chez les nègres.