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chinois eût déterminé une des oies communes à vivre avec lui. En outre, les œufs pondus par les oies de l’espèce commune étant venus à éclore, quatre petits seuls se trouvèrent purs, les dix-huit autres étaient hybrides ; le mâle chinois avait donc eu des charmes tels, qu’il l’emporta facilement auprès des femelles sur le mâle appartenant à l’espèce ordinaire. Voici un dernier cas ; M. Hewitt raconte qu’une cane sauvage élevée en captivité, « ayant déjà reproduit pendant deux saisons avec un propre mâle de son espèce, le congédia aussitôt que j’eus introduit dans le même étang une sarcelle mâle. Ce fut évidemment un cas d’amour subit, car la cane vint nager d’une manière caressante autour du nouveau venu, qui était évidemment alarmé et peu disposé à recevoir ses avances. Dès ce moment, la cane oublia son ancien compagnon. L’hiver passa, et le printemps suivant la sarcelle mâle parut avoir cédé aux attentions et aux soins dont il avait été entouré, car ils s’accouplèrent et produisirent sept ou huit petits. »

Quels ont pu être, dans ces divers cas, en dehors de la pure nouveauté, les charmes qui ont exercé leur action, c’est ce qu’il serait impossible d’indiquer. La couleur, cependant, joue quelquefois un certain rôle, car, d’après Bechstein, le meilleur moyen pour obtenir des hybrides du Fringilla spinus (tarin) avec le canari, est de mettre ensemble des oiseaux ayant la même teinte. M. Jenner Weir introduisit dans sa volière contenant des linottes, des chardonnerets, des tarins, des verdiers et d’autres oiseaux mâles, un canari femelle pour voir lequel elle choisirait ; elle n’eut pas un moment d’hésitation et s’approcha immédiatement du verdier. Ils s’accouplèrent et produisirent des hybrides.

La préférence qu’une femelle peut montrer pour un mâle plutôt que pour un autre, n’attire pas autant l’attention quand il s’agit d’individus appartenant à la même espèce. Ces cas s’observent principalement chez les oiseaux domestiques ou captifs ; mais ces oiseaux ont souvent leurs instincts viciés dans une grande mesure par un excès d’alimentation. Les pigeons et surtout les races gallines me fourniraient, sur ce dernier point, de nombreux exemples que je ne puis détailler ici. On peut expliquer par certaines perturbations des instincts quelques-unes des unions hybrides dont nous avons parlé plus haut, bien que, dans la plupart des cas que nous avons cités, les oiseaux fussent à demi libres sur de vastes étangs, et il n’y a aucune raison pour admettre qu’ils aient été artificiellement stimulés par un excès d’alimentation.

Quant aux oiseaux à l’état sauvage, la première supposition qui se présente à l’esprit est que, la saison arrivée, la femelle accepte