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aurait été identiquement le même : le succès auprès de la femelle. Il faut néanmoins reconnaître que, chez les mâles de quelques oiseaux aux vives couleurs, les plumes ont subi des modifications spéciales qui les adaptent à la production d’une certaine musique instrumentale, bien que, si nous consultons notre goût tout au moins, nous ne puissions pas comparer la beauté de cette musique à celle de la musique vocale de beaucoup d’oiseaux chanteurs.

Passons maintenant aux oiseaux mâles qui, sans être ornés à aucun degré considérable, exhibent néanmoins, lorsqu’ils courtisent les femelles, les charmes qu’ils possèdent. Ces cas, plus curieux que les précédents, sous certains rapports, ont été peu remarqués jusqu’ici. M. Jenner Weir, qui a longtemps élevé des oiseaux de bien des genres, y compris tous les Fringillidés et tous les Embérizidés d’Angleterre, a bien voulu me communiquer les faits suivants choisis parmi un ensemble considérable de notes précieuses. Le bouvreuil se présente de face à la femelle, et gonfle sa poitrine de manière à lui faire voir à la fois plus de plumes cramoisies qu’elle ne pourrait en apercevoir dans toute autre position. En même temps, il abaisse sa queue noire et la tourne de côté et d’autre d’une manière comique. Le pinson mâle se place aussi devant la femelle pour montrer sa gorge rouge et sa tête bleue ; il étend en même temps légèrement les ailes, ce qui laisse apercevoir les belles lignes blanches des épaules. La linotte commune distend sa poitrine rosée, étale légèrement ses ailes et sa queue brunes, de manière à en tirer le meilleur parti en montrant leurs bordures blanches. Il faut cependant faire toutes réserves avant de conclure que ces oiseaux n’étalent leurs ailes que pour les faire admirer, car certains oiseaux dont les ailes n’ont aucune beauté agissent de même. Le coq domestique, par exemple, n’étend jamais que l’aile opposée à la femelle et la fait traîner jusqu’à terre. Le chardonneret mâle se comporte autrement que tous les autres pinsons ; il a des ailes superbes, les épaules sont noires, et les rémiges foncées tachetées de blanc et bordées de jaune d’or. Lorsqu’il courtise la femelle, il balance son corps de droite à gauche et réciproquement, et tourne rapidement ses ailes légèrement ouvertes d’abord d’un côté, puis de l’autre, et produit ainsi un effet lumineux à reflet doré. M. Weir affirme qu’aucun autre oiseau du même groupe ne se comporte de cette façon pendant qu’il courtise la femelle, pas même le tarin mâle, espèce très-voisine ; ce dernier, il est vrai, n’ajouterait rien à sa beauté en prenant cette attitude.

La plupart des bruants anglais sont des oiseaux à couleur terne et uniforme, mais les plumes qui ornent la tête du bruant des