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terne de l’oreille, et ce repli paraît provenir de ce que l’oreille extérieure, dans son entier, a été repoussée en arrière d’une manière permanente. Chez beaucoup de singes peu élevés dans l’ordre, comme les cynocéphales et quelques espèces de macaques[1], la partie supérieure de l’oreille se termine par une pointe peu accusée, sans que le bord soit aucunement replié en dedans ; si, au contraire, le bord était replié, il en résulterait nécessairement une petite proéminence faisant saillie en dedans et probablement un peu en dehors du plan de l’oreille. C’est là, je crois, qu’il faut chercher, dans la plupart des cas, l’origine de ces proéminences. D’autre part, le professeur L. Meyer soutient dans un excellent mémoire, qu’il a récemment publié[2], que l’on ne doit voir là qu’un cas de simple variabilité, que les proéminences ne sont pas réelles, mais qu’elles sont dues à ce que le cartilage intérieur de chaque côté ne s’est pas complètement développé. Je suis tout prêt à admettre que cette explication est acceptable dans bien des cas, dans ceux, par exemple, figurés par le professeur Meyer, où on remarque plusieurs petites proéminences qui rendent sinueux le bord entier de l’hélix. Grâce à l’obligeance du Dr L. Down, j’ai pu étudier l’oreille d’un idiot microcéphale ; j’ai observé sur cette oreille une proéminence située sur le côté extérieur de l’hélix et non pas sur le repli intérieur, de sorte que cette proéminence ne peut avoir aucun rapport avec une pointe antérieure de l’oreille. Néanmoins, je crois que, dans la plupart des cas, j’étais dans le vrai en regardant ces saillies comme le dernier vestige du bout de l’oreille autrefois redressée et pointue ; je suis d’autant plus disposé à le croire que ces saillies se présentent fréquemment et que leur position correspond généralement à celle du sommet d’une oreille pointue. Dans un cas, dont on m’a envoyé une photographie, la saillie est si considérable que, si l’on adopte l’hypothèse du professeur Meyer, c’est-à-dire si l’on suppose que l’oreille deviendrait parfaite grâce à l’égal développement du cartilage dans toute l’étendue du bord, le repli aurait recouvert au moins un tiers de l’oreille entière. On m’a communiqué deux autres cas, l’un dans l’Amérique du nord, l’autre en Angleterre ; dans ces deux cas, le bord supérieur n’est pas replié intérieurement, mais il se termine en pointe, ce qui le fait ressembler étroitement à l’oreille pointue d’un quadrupède ordinaire. Dans un de ces cas, le père comparait absolument l’oreille de son jeune

  1. Voir les remarques et les dessins des oreilles de Lémuroïdes dans le mémoire de MM. Murie et Mivart. Trans. Zoolog. Soc., 1869, vol. VII, p. 6 et 90.
  2. Ueber das Darwinsche Spitzohr, Archiv für Path., Anat. und Phys., 1871, p. 485.