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dans le voisinage obéissent à cette sommation gymnastique, et, quand elles approchent, le mâle abaisse ses ailes et étale sa queue comme le fait le dindon[1].

Mais le cas le plus curieux est celui que présentent trois genres voisins d’oiseaux australiens, les fameux oiseaux à berceau, — sans doute les codescendants d’une ancienne espèce qui avait acquis l’étrange instinct de construire des abris pour s’y livrer à des parades d’amour. Ces oiseaux construisent sur le sol, dans le seul but de s’y faire la cour, car leurs nids sont établis sur les arbres, des berceaux (fig. 46), qui, comme nous le verrons plus loin, sont richement décorés avec des plumes, des coquillages, des os et des feuilles. Les mâles et les femelles travaillent à la construction de ces berceaux, mais le mâle est le principal ouvrier. Cet instinct est si prononcé chez eux qu’ils le conservent en captivité, et M. Strange a décrit[2] les habitudes de quelques oiseaux de ce genre, dits satins, qu’il a élevés en volière dans la Nouvelle-Galles du Sud. « Par moments, le mâle poursuit la femelle dans toute la volière, puis, il se rend au berceau, y prend une belle plume ou une grande feuille, articule une note curieuse, redresse toutes ses plumes, court autour du berceau, et paraît excité au point que les yeux lui sortent presque de la tête ; il ouvre une aile, puis l’autre, en faisant entendre une note profonde et aiguë, et, comme le coq domestique, semble picorer à terre, jusqu’à ce que la femelle s’approche doucement de lui. » Le capitaine Stokes a décrit les habitudes et les « habitations de plaisance » d’une autre grande espèce ; « les mâles et les femelles s’amusent à voler de côté et d’autre, prennent un coquillage tantôt d’un côté du berceau, tantôt de l’autre, et le portent dehors dans leur bec, puis le rapportent. » Ces curieuses constructions, qui ne servent que de salles de réunion où les oiseaux s’amusent et se font la cour, doivent leur coûter beaucoup de travail. Le berceau de l’espèce à poitrine fauve, par exemple, a près de quatre pieds de long, quarante-cinq centimètres de haut ; il est, en outre, supporté par une solide plate-forme composée de bâtons.


Ornementation. — Je discuterai d’abord les cas où l’ornementation est le partage exclusif des mâles, les femelles ne possédant

  1. Pour le Tetrao phasianellus, Richardson, Fauna Bor. Americ., p. 361 ; et pour d’autres détails, Cap. Blakiston, Ibis, 1863, p, 125. Pour le Cathartes et l’Ardea, Audubon, Orn. Biograph., vol. II. p. 51 et vol. III, p. 89. Sur la fauvette grise, Macgillivray, Hist. Brit. Birds, vol. II, 354. Sur l’outarde indienne, Jerdon, Birds of India, vol. III, p. 618.
  2. Gould, Handbook to the Birds of Australia vol. I, 444, 449, 445. Le berceau de l’oiseau satin est toujours visible aux Zoological Gardens.