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dure semblable, et ressemblent beaucoup à celles du L. agestis. Enfin, les L. arion mâles et femelles sont bleus et se ressemblent beaucoup ; les bords des ailes sont toutefois un peu plus sombres chez la femelle, et les taches noires sont plus nettes : chez une espèce indienne qui affecte une coloration bleu brillant, les mâles et les femelles se ressemblent encore davantage.

Je suis entré dans ces quelques détails afin de prouver, en premier lieu, que, chez les papillons, lorsque les mâles et les femelles ne se ressemblent pas, le mâle est, en règle générale, le plus beau et s’écarte le plus du type ordinaire de la coloration du groupe auquel l’espèce appartient. Il en résulte que, dans la plupart des groupes, les femelles des diverses espèces se ressemblent beaucoup plus que ne le font les mâles. Toutefois, dans quelques cas exceptionnels, sur lesquels nous aurons à revenir, les femelles affectent des couleurs encore plus brillantes que ne le sont celles des mâles. En second lieu, les exemples que nous avons cités prouvent que, dans un même genre, on peut souvent observer, entre les mâles et les femelles, toute une série de gradations depuis une identité presque absolue de coloration jusqu’à une différence assez prononcée pour que, pendant longtemps, les entomologistes aient classé le mâle et la femelle dans des genres différents. En troisième lieu, il résulte des faits que nous avons cités que, lorsque le mâle et la femelle se ressemblent beaucoup, cela peut provenir de ce que le mâle a transmis ses couleurs à la femelle, ou de ce qu’il a conservé ou peut-être recouvré les couleurs primitives du genre auquel l’espèce appartient. Il faut aussi remarquer que, dans les groupes où les sexes offrent une certaine différence de coloration, les femelles, jusqu’à un certain point, ressemblent ordinairement aux mâles, de sorte que lorsque ceux-ci atteignent à un degré extraordinaire de splendeur, les femelles présentent presque invariablement aussi un certain degré de beauté. Nous avons vu qu’il existe de nombreux cas de gradation dans l’étendue des différences observées entre les mâles et les femelles ; nous avons aussi fait remarquer qu’un même type général de coloration domine dans l’ensemble d’un même groupe ; ces deux faits nous permettent de conclure que les causes, quelles qu’elles puissent être, qui ont déterminé chez quelques espèces la brillante coloration du mâle seul, et celle des mâles et des femelles à un degré plus ou moins égal chez d’autres espèces, ont été généralement les mêmes.

Les régions tropicales abondent en splendides papillons, aussi a-t-on souvent supposé que ces insectes doivent leur coloration à la