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queur. » Westwood[1] dit avoir vu des Tenthrédinées mâles « qui, à la suite d’un combat, sont restés engagés par la mâchoire sans pouvoir se dégager. » M. Fabre a constaté que les Cerceris mâles cherchent à s’assurer la possession d’une femelle particulière ; il est indispensable de rappeler à cet égard que les insectes appartenant à cet ordre ont la faculté de se reconnaître, après de longs intervalles de temps, et s’attachent profondément l’un à l’autre. Ainsi, Pierre Huber, dont on ne peut mettre l’exactitude en question, affirme que des fourmis, séparées pendant quatre mois de leur fourmilière, mises en présence de leurs anciennes compagnes, se reconnurent et se caressèrent mutuellement avec leurs antennes. Étrangères, elles se seraient battues. En outre, lorsque deux tribus se livrent bataille, il arrive que, dans la mêlée, des fourmis appartenant au même parti s’attaquent quelquefois, mais elles ne tardent pas à s’apercevoir de leur erreur et se consolent réciproquement[2].

On constate fréquemment dans cet ordre de légères différences de coloration suivant le sexe, mais les différences considérables sont rares, sauf dans la famille des abeilles ; cependant les mâles et les femelles de certains groupes affectent des couleurs si brillantes, — les Chrysis, par exemple, chez lesquels prédominent le vermillon et les verts métalliques, — que nous sommes tentés d’attribuer cette coloration à la sélection sexuelle. Les Ichneumonides mâles, d’après M. Walsh[3], affectent presque toujours des couleurs plus claires que les femelles. Les Tenthrédinides mâles, au contraire, sont généralement plus foncés que les femelles. Chez les Siricidés, les sexes diffèrent fréquemment ; ainsi le Sirex juvencus mâle est rayé d’orange, tandis que la femelle est pourpre foncé ; mais il est difficile de dire lequel des deux sexes est le plus orné. Le Tremex columbæ femelle est beaucoup plus brillamment coloré que le mâle. M. F. Smith assure que les mâles de plusieurs espèces de fourmis sont noirs, tandis que les femelles sont couleur brique.

Dans la famille des abeilles, surtout chez les espèces solitaires, la coloration des individus des deux sexes diffère souvent. Les mâles sont généralement les plus brillants, et, chez les Bombus et chez les Apathus, revêtent des teintes plus variées que les femelles. L’Anthophora retusa mâle est d’un beau brun fauve éclatant, tandis que la femelle est toute noire ; chez plusieurs espèces de Xylocopa, les mâles sont jaune clair et les femelles noires. D’un autre côté,

  1. Journ. of Proc. Entom. Soc., 7 sept. 1863, p. 169.
  2. P. Huber, Recherches sur les mœurs des fourmis, 1810, pp. 150, 165.
  3. Proc. Entom. Soc. of Philadelphia, 1866, p. 238-239.