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560 Récapitulation et conclusions.  

chaque formation présentent, dans une certaine mesure, des caractères intermédiaires, comparativement aux fossiles enfouis dans les formations inférieures et supérieures, s’explique tout simplement par la situation intermédiaire qu’ils occupent dans la chaîne généalogique. Ce grand fait, que tous les êtres éteints peuvent être groupés dans les mêmes classes que les êtres vivants, est la conséquence naturelle de ce que les uns et les autres descendent de parents communs. Comme les espèces ont généralement divergé en caractères dans le long cours de leur descendance et de leurs modifications, nous pouvons comprendre pourquoi les formes les plus anciennes, c’est-à-dire les ancêtres de chaque groupe, occupent si souvent une position intermédiaire, dans une certaine mesure, entre les groupes actuels. On considère les formes nouvelles comme étant, dans leur ensemble, généralement plus élevées dans l’échelle de l’organisation que les formes anciennes ; elles doivent l’être d’ailleurs, car ce sont les formes les plus récentes et les plus perfectionnées qui, dans la lutte pour l’existence, ont dû l’emporter sur les formes plus anciennes et moins parfaites ; leurs organes ont dû aussi se spécialiser davantage pour remplir leurs diverses fonctions. Ce fait est tout à fait compatible avec celui de la persistance d’êtres nombreux, conservant encore une conformation élémentaire et peu parfaite, adaptée à des conditions d’existence également simples ; il est aussi compatible avec le fait que l’organisation de quelques formes a rétrogradé parce que ces formes se sont successivement adaptées, à chaque phase de leur descendance, à des conditions modifiées d’ordre inférieur. Enfin, la loi remarquable de la longue persistance de formes alliées sur un même continent — des marsupiaux en Australie, des édentés dans l’Amérique méridionale, et autres cas analogues — se comprend facilement, parce que, dans une même région, les formes existantes doivent être étroitement alliées aux formes éteintes par un lien généalogique.

En ce qui concerne la distribution géographique, si l’on admet que, dans le cours immense des temps écoulés, il y a eu de grandes migrations dans les diverses parties du globe, dues à de nombreux changements climatériques et géographiques, ainsi qu’à des moyens nombreux, occasionnels et pour la plupart inconnus de dispersion, la plupart des faits importants de la distri-