Extinction. | 395 |
introduction dans l’Amérique du Sud par les Espagnols, est redevenu sauvage dans tout le pays et s’est multiplié avec une rapidité sans pareille ; je devais donc me demander quelle pouvait être la cause de l’extinction du cheval primitif, dans des conditions d’existence si favorables en apparence. Mon étonnement était mal fondé ; le professeur Owen ne tarda pas à reconnaître que la dent, bien que très semblable à celle du cheval actuel, appartenait à une espèce éteinte. Si ce cheval avait encore existé, mais qu’il eût été rare, personne n’en aurait été étonné ; car dans tous les pays la rareté est l’attribut d’une foule d’espèces de toutes classes ; si l’on demande les causes de cette rareté, nous répondons qu’elles sont la conséquence de quelques circonstances défavorables dans les conditions d’existence, mais nous ne pouvons presque jamais indiquer quelles sont ces circonstances. En supposant que le cheval fossile ait encore existé comme espèce rare, il eût semblé tout naturel de penser, d’après l’analogie avec tous les autres mammifères, y compris l’éléphant, dont la reproduction est si lente, ainsi que d’après la naturalisation du cheval domestique dans l’Amérique du Sud, que, dans des conditions favorables, il eût, en peu d’années, repeuplé le continent. Mais nous n’aurions pu dire quelles conditions défavorables avaient fait obstacle à sa multiplication ; si une ou plusieurs causes avaient agi ensemble ou séparément ; à quelle période de la vie et à quel degré chacune d’elles avait agi. Si les circonstances avaient continué, si lentement que ce fût, à devenir de moins en moins favorables, nous n’aurions certainement pas observé le fait, mais le cheval fossile serait devenu de plus en plus rare, et se serait finalement éteint, cédant sa place dans la nature à quelque concurrent plus heureux.
Il est difficile d’avoir toujours présent à l’esprit le fait que la multiplication de chaque forme vivante est sans cesse limitée par des causes nuisibles inconnues qui cependant sont très suffisantes pour causer d’abord la rareté et ensuite l’extinction. On comprend si peu ce sujet, que j’ai souvent entendu des gens exprimer la surprise que leur causait l’extinction d’animaux géants, tels que le mastodonte et le dinosaure, comme si la force corporelle seule suffisait pour assurer la victoire dans la lutte pour l’existence. La grande taille d’une espèce, au contraire, peut entraîner