Page:Darwin - L’Origine des espèces (1906).djvu/353

Cette page a été validée par deux contributeurs.
  Causes de la stérilité. 335

sexuels ne sont qu’imparfaitement développés, le cas est quelque peu différent. J’ai plus d’une fois fait allusion à un ensemble de faits que j’ai recueillis, prouvant que, lorsque l’on place les animaux et les plantes en dehors de leurs conditions naturelles, leur système reproducteur en est très fréquemment et très gravement affecté. C’est là ce qui constitue le grand obstacle à la domestication des animaux. Il y a de nombreuses analogies entre la stérilité ainsi provoquée et celle des hybrides. Dans les deux cas, la stérilité ne dépend pas de la santé générale, qui est, au contraire, excellente, et qui se traduit souvent par un excès de taille et une exubérance remarquable. Dans les deux cas, la stérilité varie quant au degré ; dans les deux cas, c’est l’élément mâle qui est le plus promptement affecté, quoique quelquefois l’élément femelle le soit plus profondément que le mâle. Dans les deux cas, la tendance est jusqu’à un certain point en rapport avec les affinités systématiques, car des groupes entiers d’animaux et de plantes deviennent impuissants à reproduire quand ils sont placés dans les mêmes conditions artificielles, de même que des groupes entiers d’espèces tendent à produire des hybrides stériles. D’autre part, il peut arriver qu’une seule espèce de tout un groupe résiste à de grands changements de conditions sans que sa fécondité en soit diminuée, de même que certaines espèces d’un groupe produisent des hybrides d’une fécondité extraordinaire. On ne peut jamais prédire avant l’expérience si tel animal se reproduira en captivité, ou si telle plante exotique donnera des graines une fois soumise à la culture ; de même qu’on ne peut savoir, avant l’expérience, si deux espèces d’un genre produiront des hybrides plus ou moins stériles. Enfin, les êtres organisés soumis, pendant plusieurs générations, à des conditions nouvelles d’existence, sont extrêmement sujets à varier ; fait qui paraît tenir en partie à ce que leur système reproducteur a été affecté, bien qu’à un moindre degré que lorsque la stérilité en résulte. Il en est de même pour les hybrides dont les descendants, pendant le cours des générations successives, sont, comme tous les observateurs l’ont remarqué, très sujets à varier.

Nous voyons donc que le système reproducteur, indépendamment de l’état général de la santé, est affecté d’une manière très analogue lorsque les êtres organisés sont placés dans des