Effets de l’usage et du non-usage. | 151 |
rope. Nous possédons quelques preuves de la gradation de cette habitude ; Schiödte ajoute en effet : « Nous pouvons donc regarder les faunes souterraines comme de petites ramifications qui, détachées des faunes géographiques limitées du voisinage, ont pénétré sous terre et qui, à mesure qu’elles se plongeaient davantage dans l’obscurité, se sont accommodées à leurs nouvelles conditions d’existence. Des animaux peu différents des formes ordinaires ménagent la transition ; puis, viennent ceux conformés pour vivre dans un demi-jour ; enfin, ceux destinés à l’obscurité complète et dont la structure est toute particulière. » Je dois ajouter que ces remarques de Schiödte s’appliquent, non à une même espèce, mais à plusieurs espèces distinctes. Quand, après d’innombrables générations, l’animal atteint les plus grandes profondeurs, le non-usage de l’organe a plus ou moins complètement atrophié l’œil, et la sélection naturelle lui a, souvent aussi, donné une sorte de compensation pour sa cécité en déterminant un allongement des antennes. Malgré ces modifications, nous devons encore trouver certaines affinités entre les habitants des cavernes de l’Amérique et les autres habitants de ce continent, aussi bien qu’entre les habitants des cavernes de l’Europe et ceux du continent européen. Or, le professeur Dana m’apprend qu’il en est ainsi pour quelques-uns des animaux qui habitent les grottes souterraines de l’Amérique ; quelques-uns des insectes qui habitent les cavernes de l’Europe sont très voisins de ceux qui habitent la région adjacente. Dans l’hypothèse ordinaire d’une création indépendante, il serait difficile d’expliquer de façon rationnelle les affinités qui existent entre les animaux aveugles des grottes et les autres habitants du continent. Nous devons, d’ailleurs, nous attendre à trouver, chez les habitants des grottes souterraines de l’ancien et du nouveau monde, l’analogie bien connue que nous remarquons dans la plupart de leurs autres productions. Comme on trouve en abondance, sur des rochers ombragés, loin des grottes, une espèce aveugle de Bathyscia, la perte de la vue chez l’espèce de ce genre qui habite les grottes souterraines, n’a probablement aucun rapport avec l’obscurité de son habitat ; il semble tout naturel, en effet, qu’un insecte déjà privé de la vue s’adapte facilement à vivre dans les grottes obscures. Un autre genre aveugle (Anophthal-