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130 La sélection naturelle.  

primitif, les six espèces descendant de I, grâce à l’hérédité seule, doivent différer considérablement des huit espèces descendant de A ; en outre, nous avons supposé que les deux groupes ont continué à diverger dans des directions différentes. Les espèces intermédiaires, et c’est là une considération fort importante, qui reliaient les espèces originelles A et I, se sont toutes éteintes, à l’exception de F, qui seul a laissé des descendants. En conséquence, les six nouvelles espèces descendant de I, et les huit espèces descendant de A, devront être classées comme des genres très distincts, ou même comme des sous-familles distinctes.

C’est ainsi, je crois, que deux ou plusieurs genres descendent, par suite de modifications, de deux ou de plusieurs espèces d’un même genre. Ces deux ou plusieurs espèces souches descendent aussi, à leur tour, de quelque espèce d’un genre antérieur. Cela est indiqué, dans notre diagramme, par les lignes ponctuées placées au-dessous des lettres majuscules, lignes convergeant en groupe vers un seul point. Ce point représente une espèce, l’ancêtre supposé de nos sous-genres et de nos genres. Il est utile de s’arrêter un instant pour considérer le caractère de la nouvelle espèce F14, laquelle, avons-nous supposé, n’a plus beaucoup divergé, mais a conservé la forme de F, soit avec quelques légères modifications, soit sans aucun changement. Les affinités de cette espèce vis-à-vis des quatorze autres espèces nouvelles doivent être nécessairement très curieuses. Descendue d’une forme située à peu près à égale distance entre les espèces souches A et I, que nous supposons éteintes et inconnues, elle doit présenter, dans une certaine mesure, un caractère intermédiaire entre celui des deux groupes descendus de cette même espèce. Mais, comme le caractère de ces deux groupes s’est continuellement écarté du type souche, la nouvelle espèce F14 ne constitue pas un intermédiaire immédiat entre eux ; elle constitue plutôt un intermédiaire entre les types des deux groupes. Or, chaque naturaliste peut se rappeler, sans doute, des cas analogues.

Nous avons supposé, jusqu’à présent, que chaque ligne horizontale du diagramme représente mille générations ; mais chacune d’elles pourrait représenter un million de générations, ou même