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HÉRÉDITÉ.

conditions. On sait qu’un grand nombre de femelles d’oiseaux, telles que les poules, diverses faisanes, les femelles de perdrix, de paons, les canes, etc., revêtent partiellement les caractères secondaires mâles de leur espèce, après l’ablation des ovaires, ou lorsqu’elles vieillissent. Ce cas paraît se présenter chez la poule faisane, plus fréquemment dans certaines saisons que dans d’autres[1]. Une cane âgée de dix ans, a été signalée comme ayant revêtu les plumages parfaits d’hiver et d’été du canard mâle[2]. Waterton[3] rapporte un cas curieux d’une poule, qui, après avoir cessé de pondre, prit le plumage, la voix, les ergots, et le naturel belliqueux du coq, et se montrait toute prête à combattre l’adversaire qu’on lui présentait. Tous les caractères, y compris l’instinct du combat, étaient donc restés assoupis chez cette poule, tant que ses ovaires avaient rempli leurs fonctions. On connaît des cas de femelles de deux espèces de cerfs, qui avaient pris des cornes en vieillissant, et selon l’observation de Hunter, nous pouvons voir quelque chose d’analogue dans l’espèce humaine.

On sait d’autre part que chez les animaux mâles, les caractères sexuels secondaires disparaissent plus ou moins, à la suite de la castration. Ainsi, lorsqu’on opère un jeune coq, Yarrell assure qu’il cesse de chanter ; la crête, les caroncules et les ergots n’atteignent pas leurs dimensions complètes, et les plumes sétiformes prennent un état intermédiaire entre celles du coq et les plumes des poules. On a signalé des cas où la captivité seule avait causé des résultats analogues. Le mâle, dans ces conditions, acquiert quelquefois des caractères propres à la femelle ; ainsi le chapon se met à couver et fera éclore des œufs ; et ce qui est curieux, c’est que les hybrides mâles stériles du faisan et de la poule font la même chose, et saisissent le moment où les poules quittent leur nid, pour prendre leur place[4]. Réaumur[5] assure qu’on peut apprendre

  1. Yarrell, Philos. Transact., 1827, p. 268. — Dr Hamilton, Proc. Zool. Soc., 1862, p. 23.
  2. Archiv. Skand. Beiträge zur Naturgesch., VIII, p. 397–413.
  3. Essays on Nat. Hist., 1838. — M. Hewitt, Jour. of Horticult., juillet 1864, p. 37, donne des cas analogues de poules faisanes. — Isid. Geoffroy Saint-Hilaire, Essais de Zoologie générale, 1812, p. 496–513, a réuni les cas de dix oiseaux différents. Il paraît qu’Aristote connaissait les changements de disposition qui ont lieu chez les vieilles poules.
  4. Cottage Gardener, 1869, p. 379.
  5. Art de faire éclore, etc., 1749, t. II. p. 8.