Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 2, 1868.djvu/57

Cette page a été validée par deux contributeurs.
50
HÉRÉDITÉ.

dance au retour, qui a été fort exagérée, existe sans doute chez les animaux redevenus sauvages, et est chez eux compréhensible jusqu’à un certain point. Ainsi, chez les porcs, redevenus libres, l’exposition aux intempéries devra favoriser la croissance des soies, ce qui arrive d’ailleurs au poil d’autres animaux domestiques, et, par corrélation, les crocs tendront à se développer aussi. Mais la réapparition des raies longitudinales caractérisant la livrée des jeunes marcassins, ne peut être attribuée à l’action directe des conditions extérieures. Dans ce cas, comme dans beaucoup d’autres, nous ne pouvons que dire que les changements d’habitudes ont probablement favorisé une tendance, inhérente ou latente dans l’espèce, à revenir à l’état primitif.

Dans un chapitre futur, nous montrerons que la position des fleurs au sommet de l’axe et celle des graines dans leur capsule, déterminent quelquefois une tendance au retour, ce qui paraît dépendre de la quantité de séve ou de nourriture qui peut arriver aux bourgeons floriifères et aux graines. La position des bourgeons, tant sur les branches que sur les racines, détermine aussi quelquefois la transmission du caractère propre de la variété, ou son retour vers un état antérieur.

Nous avons vu que, lorsque deux races ou espèces sont croisées, il y a chez leurs produits une tendance prononcée à une réapparition de caractères dès longtemps perdus, et qui ne se trouvent ni chez les parents immédiats, ni chez les précédents. Lorsqu’on unit deux pigeons de races bien établies, rouges, blancs ou noirs, les produits héritent presque sûrement des mêmes couleurs ; mais, lorsqu’on croise des oiseaux de couleurs différentes, il semble que les forces héréditaires opposées s’annulent mutuellement, et que les tendances réunies qu’ont les deux parents à produire des petits bleu ardoisé l’emportent. Il en est de même dans plusieurs autres cas. Mais, lorsqu’on croise, par exemple, l’âne commun avec l’A. indicus, ou avec le cheval, — animaux dont les jambes ne sont pas rayées, — et que les métis ont des raies prononcées sur les membres et même sur la tête, — tout ce qu’on peut dire est que la tendance inhérente au retour est provoquée par quelque perturbation, que le fait du croisement détermine dans l’organisme.