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RETOUR.

Le quagga est, comme le zèbre, rayé sur toute la partie antérieure du corps, mais ne porte sur les jambes que de faibles traces de raies, ou même point. Mais dans le fameux hybride élevé par lord Morton[1], provenant d’une jument arabe baie, presque pure, et d’un quagga mâle, les raies des jambes furent beaucoup plus nettement définies et plus foncées que chez le quagga. Livrée ultérieurement à un cheval arabe noir, la même jument mit bas deux poulains, qui, tous deux, comme nous l’avons déjà dit, portaient des raies distinctes sur les jambes, l’un ayant aussi des raies sur le cou et le corps.

L’Asinus Indicus[2] porte une bande dorsale, mais ni bandes scapulaires, ni raies aux jambes : on peut cependant quelquefois en remarquer des traces, même chez les adultes[3], et le colonel S. Poole, qui a eu l’occasion de faire de nombreuses observations de ce genre, me dit que, chez l’ânon, à sa naissance, la tête et les jambes sont souvent barrées, mais que la bande scapulaire est moins prononcée que dans l’âne domestique ; toutes ces marques, la dorsale exceptée, disparaissant bientôt. Un métis, élevé à Knowsley[4], provenant d’une femelle de cette espèce, par un âne domestique mâle, eut les quatre jambes barrées d’une manière très-prononcée ; trois bandes scapulaires courtes sur chaque épaule, et même quelques raies zébrées sur la face. Le Dr Gray m’apprend qu’il a eu occasion de voir un second métis de même provenance, rayé de la même manière.


Nous voyons, d’après ces divers faits, que les croisements entre les différentes espèces du genre Equus, ont une tendance évidente à déterminer la réapparition des raies sur différentes parties du corps, et surtout sur les jambes. Mais, comme nous ignorons si l’ancêtre primitif du genre possédait de pareilles marques, ce n’est qu’hypothétiquement que nous pouvons les attribuer à un effet de retour. Toutefois, si on considère les faits analogues et incontestables qui ont été observés chez les pigeons, les poules, canards, etc., on ne peut qu’arriver à la même conclusion relativement au genre cheval ; et il faut alors admettre que l’ancêtre du groupe devait, sur les jambes, les épaules, la face, et peut-être sur tout le corps, être marqué de bandes comme le zèbre. Autrement la réapparition fréquente

  1. Philos. Transact., 1821, p. 20.
  2. Sclater, O. C., p. 163. Cette espèce est le Ghor Khur du N.-O. de l’Inde, et a été souvent appelée l’Hémione de Pallas. — Voir Blyth, Journal Asiat. Soc. of Bengal, vol. XXVIII, 1860, p. 229.
  3. Une autre espèce d’âne sauvage, la vraie A. Hemionus ou Kiang, qui ordinairement n’a pas de bandes scapulaires, peut en présenter quelquefois, qui, comme chez le cheval et l’âne, peuvent être doubles. Voir Indian sporting Review, 1856, p. 320. — Col. Ham. Smith, Nat. Library, Horses, p. 318. — Dict. class. d’Hist. nat., t. III, p. 563.
  4. Figuré dans Gleanings from the Knowsley Menageries, par le Dr J. E. Gray.