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REMARQUES FINALES.

Il ne faut point exagérer l’importance de l’action définie que peuvent exercer les changements de conditions ou les effets de l’usage et du défaut d’usage, pour modifier d’une manière semblable tous les individus d’une même espèce. Chaque partie de l’organisme étant très-variable, et les variations pouvant être tant d’une manière consciente qu’inconsciente, triées par sélection, il est difficile de distinguer entre les effets directs des conditions extérieures et ceux de la sélection des variations non définies. Ainsi il est possible que les pattes de nos chiens aquatiques et des chiens américains qui ont à marcher sur la neige, soient devenues partiellement palmées par le fait qu’ils écartaient beaucoup les doigts ; mais il est plus probable que la palmure, comme la membrane interdigitale de certains pigeons, a apparu spontanément, et s’est ensuite augmentée par la conservation pendant une longue suite de générations des meilleurs nageurs ou de ceux qui pouvaient le mieux marcher sur la neige. Un éleveur de fantaisie qui voudrait réduire la taille de ses Bantams ou de ses pigeons Culbutants ne songerait jamais à les affamer, mais choisirait toujours les plus petits individus qui surgiraient spontanément. Les mammifères naissent quelquefois sans poil, et des races nues ont été formées, mais il n’y a pas lieu de croire que le fait ait été causé par la chaleur du climat.

La haute température du climat des tropiques fait perdre aux moutons leur toison, et l’humidité et le froid agissent d’autre part comme stimulants pour la croissance du poil ; il est toutefois possible que ces changements ne soient simplement qu’une exagération du renouvellement annuel et régulier de robe ; mais qui pourra décider jusqu’à quel point ce changement périodique, ou l’épaisse fourrure des animaux arctiques, ou leur couleur blanche, sont dus à l’action directe d’un climat rigoureux, et quelle est la part qu’il faut attribuer à la conservation pendant une longue suite de générations des individus les mieux protégés ?

De toutes les lois qui régissent la variabilité, celle de la corrélation est la plus importante. Pour un grand nombre de cas de légères déviations de conformation comme pour des monstruosités graves, nous ne pouvons pas même soupçonner quel peut être le genre de corrélation qui les relie ; mais pour