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HYPOTHÈSE PROVISOIRE

multiplient dans le corps humain, et quelle est la puissance de leur action. Il existe des organismes indépendants à peine visibles à l’aide des plus puissants grossissements auxquels nos meilleurs microscopes peuvent atteindre, et qui sont probablement aussi gros que les cellules ou unités des animaux supérieurs ; et cependant ces organismes doivent sans doute se reproduire par des germes excessivement petits, relativement à leur dimension, qui est déjà si réduite. L’objection tirée de la difficulté, qui paraît d’abord insurmontable, d’admettre l’existence de gemmules aussi nombreuses et aussi petites que l’exige notre hypothèse, n’a donc pas un grand poids.

Les cellules ou unités du corps sont, d’après l’opinion générale des physiologistes, regardées comme ayant leur autonomie, comme les bourgeons d’un arbre, mais à un moindre degré. Je fais un pas de plus, et je suppose qu’elles émettent des gemmules reproductrices. Ainsi l’animal n’engendre pas son espèce, comme un tout, par la seule action de son système reproducteur, mais chaque cellule séparée engendre son propre type. Les naturalistes ont souvent dit que chaque cellule d’une plante a la capacité réelle ou potentielle de reproduire la plante entière, mais elle ne jouit de cette propriété que parce qu’elle contient des gemmules provenant de toutes ses parties. Si notre hypothèse est provisoirement acceptée, nous devons considérer toutes les formes de reproduction asexuelle, qu’elles aient lieu à l’état adulte, ou, comme dans les cas de génération alternante, pendant le jeune âge, comme étant fondamentalement les mêmes et dépendant de l’agrégation mutuelle et de la multiplication des gemmules. La régénération d’un membre amputé ou la cicatrisation d’une blessure se font d’après le même procédé agissant partiellement. La génération sexuelle diffère sous quelques rapports importants, principalement, à ce qu’il semble, en ce que le nombre de gemmules agrégées dans chaque élément sexuel séparé est insuffisant, et peut-être aussi par la présence de certaines cellules primordiales. Le développement de chaque être, en comprenant toutes les formes de métamorphose et de métagenèse, ainsi que la croissance des animaux plus élevés dans l’échelle, chez lesquels la conformation ne change pas d’une manière frappante, dépend de la présence