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DE LA PANGENÈSE.

constamment qu’il constitue évidemment une partie essentielle de la loi générale de l’hérédité. Il a lieu chez les êtres qui se propagent par génération séminale ou par bourgeons, et peut même s’observer sur un même individu à mesure qu’il avance en âge. La tendance au retour est souvent provoquée par un changement dans les conditions, et l’est très-évidemment par l’acte du croisement. Les formes croisées sont d’abord généralement intermédiaires par leurs caractères aux formes parentes ; mais dès la génération suivante elles font ordinairement retour vers un ou vers leurs deux grands-parents, et quelquefois vers des ancêtres plus éloignés. Comment nous expliquer ces faits ? Chaque unité organique d’un hybride doit, d’après la doctrine de la pangenèse, émettre une foule de gemmules hybrides, car les plantes croisées se propagent facilement et largement par bourgeons ; mais d’après la même hypothèse, il doit y avoir également des gemmules dormantes émanant des deux formes parentes pures ; et ces dernières conservant leur état normal, doivent être probablement aptes à se multiplier largement pendant la vie de chaque hybride. Les éléments sexuels d’un hybride renfermeront donc à la fois des gemmules pures et hybrides ; et lorsqu’on appariera deux hybrides, la combinaison de gemmules pures provenant de l’un des hybrides, avec les gemmules également pures dérivées des mêmes points de l’autre, déterminera nécessairement un retour complet des caractères ; car il n’est peut-être pas trop téméraire de supposer que des gemmules de même nature inaltérées et non modifiées, doivent être tout particulièrement aptes à se combiner. Les gemmules pures combinées avec des gemmules hybrides détermineront un retour partiel. Enfin, les gemmules hybrides provenant des deux parents reproduiront simplement la forme hybride[1]. Tous ces cas et degrés de retour s’observent constamment.

Nous avons montré dans le quinzième chapitre que certains caractères paraissent antagonistes et ne peuvent se fusionner ensemble ; de là, lorsqu’on croise deux animaux présentant des caractères de ce genre, il pourrait arriver qu’il n’y eût pas chez le mâle seul assez de gemmules pour la repro-

  1. Naudin, Nouv. archives du Muséum, t. I, p. 151, parle des éléments ou essences des deux espèces qui sont croisées.