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DE LA PANGENÈSE.

de nouvelles cellules entre les cellules préexistantes et indépendamment d’elles, nous devons conclure que les gemmules provenant du pollen étranger ne se développent pas simplement au contact des cellules préexistantes, mais pénètrent effectivement dans les cellules naissantes de la plante mère ; ce qui peut se comparer à ce qui se passe dans l’acte ordinaire de la fécondation, pendant lequel le contenu des tubes polliniques pénètre dans le sac embryonnaire à l’intérieur de l’ovule, et détermine le développement de l’embryon. D’après cette manière de voir, on pourrait littéralement dire que les cellules de la plante mère sont fécondées par les gemmules émanées du pollen étranger. Dans tous les organismes, on peut de même dire que les cellules ou unités organiques de l’embryon, pendant les phases successives de son évolution, sont fécondées par les gemmules des cellules qui arrivent ensuite dans l’ordre de formation.

Les animaux sont complétement développés lorsqu’ils sont capables de reproduction sexuelle, et il semble à peine possible que l’élément mâle puisse affecter d’une manière aussi directe que dans les plantes les tissus de la mère ; il n’en est pas moins certain que les ovaires de celle-ci sont quelquefois affectés par une fécondation antérieure, au point que les ovules ultérieurement fécondés par un mâle différent portent nettement les traces de l’influence du premier ; ce fait, comme dans le cas d’un pollen étranger, peut se comprendre par la diffusion, la conservation et l’action des gemmules provenant des spermatozoïdes du mâle antérieur.

Chaque organisme arrive à maturité après un cours de développement plus ou moins long. Les changements qu’il éprouve pendant ce temps peuvent être petits et très-lents, comme lorsque l’enfant devient homme ; ou nombreux, brusques et légers, comme dans les métamorphoses de certaines Éphémères ; ou en petit nombre et fortement prononcés, comme dans la plupart des autres insectes. Chaque partie peut se mouler au dedans d’une partie préexistante et correspondante, et dans ce cas elle paraîtra, à tort selon moi, formée aux dépens de la partie précédente, ou bien elle peut se développer dans une partie du corps entièrement distincte, comme dans les cas extrêmes de métagenèse. Un œil peut, par exemple, se