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DE LA PANGENÈSE.

manière que les parties correspondantes soient les seules à s’affecter mutuellement ; ainsi un veau produit d’une vache à courtes cornes par un taureau à longues cornes aura les cornes, et non les sabots, affectées par cette réunion des deux formes, et les produits de l’union de deux oiseaux à queues de couleur diverse auront la queue affectée et non le plumage entier.

Les divers tissus du corps manifestent, ainsi que plusieurs physiologistes l’ont observé[1], une certaine affinité pour des substances organiques spéciales, qu’elles soient naturelles ou étrangères au corps. Nous voyons cela dans les cellules du rein attirant l’urée du sang ; dans l’action du curare sur les nerfs, celle de l’upas et de la digitale sur les muscles, celle de la cantharide (Lytta vesicatoria) sur les reins, et dans le fait que les matières virulentes d’un grand nombre de maladies, comme la petite vérole, la scarlatine, la coqueluche, la morve, le cancer et la rage, affectent certaines parties définies du corps et certaines glandes ou tissus.

L’affinité de diverses parties du corps les unes pour les autres pendant leur premier développement a été signalée dans le précédent chapitre, lorsque nous avons discuté la tendance à la fusion des parties homologues. L’affinité se manifeste dans la fusion normale des organes qui, dans les premières phases embryonnaires sont séparés, et encore plus dans les cas de monstres doubles chez lesquels chaque os, muscle, vaisseau et nerf d’un embryon se confond avec la partie correspondante de l’autre. L’affinité entre les organes homologues peut se manifester sur des parties isolées aussi bien que chez l’individu entier, comme dans les cas de fleurs ou fruits symétriquement fusionnés, et présentant toutes leurs parties en double, sans autre trace de leur fusion.

On a aussi supposé que le développement de chaque gemmule dépendait de son union avec une autre cellule ou unité qui venant de commencer son développement, et la précédant dans l’ordre de croissance, se trouve être en quelque sorte d’une nature un peu différente. Il ne serait pas non plus improbable de supposer que le développement d’une gemmule puisse être déterminé par son union avec une cellule de nature un

  1. Paget, Lectures on Pathology, p. 27. — Virchow, O. C. (trad. angl.), p. 123, 126, 294. — Claude Bernard, des Tissus vivants, p. 177, 210, 337. — Physiologie de Müller.