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DE LA PANGENÈSE.

renferment trop peu de matière formatrice pour jouir d’une existence indépendante et pour pouvoir se développer, car il est certain que dans les cas ordinaires, ils ne diffèrent pas quant à leur puissance de déterminer les caractères de l’embryon. Cette idée de l’importance de la quantité de matière formatrice est rendue probable par les considérations qui suivent. Il n’y a pas lieu de croire que les spermatozoïdes ou les grains de pollen d’un même individu, animal ou végétal, doivent différer les uns des autres ; cependant Quatrefages a montré que chez le Teredo[1], comme l’avaient précédemment fait Prevost et Dumas chez d’autres animaux, il faut plus d’un spermatozoïde pour féconder un ovule. Ceci a été également nettement démontré par Newport[2], qui signale en outre le fait important, basé sur de nombreuses expériences, que lorsqu’on ne met en contact les œufs de Batraciens qu’avec un petit nombre de spermatozoïdes, ils ne sont que partiellement fécondés, et que l’embryon ne se développe jamais complétement ; le premier pas de l’évolution qui est la segmentation partielle du vitellus, se fait plus ou moins, mais ne s’achève pas et n’atteint pas la phase granuleuse. La rapidité de la segmentation est également réglée par le nombre des spermatozoïdes. Kölreuter et Gärtner ont obtenu des résultats semblables sur les plantes. Ce dernier observateur trouva[3] après plusieurs essais successifs sur une Mauve, que même trente grains de pollen ne suffisaient pas pour féconder une seule graine, et que quarante grains ayant été appliqués sur un stigmate, quelques petites graines seules s’étaient développées. Les grains de pollen de Mirabilis sont très-gros, et l’ovaire ne contient qu’un seul ovule ; ces circonstances favorables engagèrent Naudin[4] à faire quelques expériences intéressantes : une fleur fécondée par trois grains de pollen réussit parfaitement ; il en féconda douze par deux grains seulement, et dix-sept par un seul, et dans chacune de ces deux séries, une seule fleur donna de la graine ; il faut noter que les plantes levées de ces deux graines, n’atteignirent pas leurs dimensions normales et ne portèrent

  1. Ann. des sciences nat., 3e série, 1850, t. XIII.
  2. Trans. Phil. Soc., 1851, p. 196, 208, 210 ; 1853, p. 245, 247.
  3. Beitræge zur Kenntniss, etc., 1844, p. 345.
  4. Nouvelles archives du Muséum, t. I, p. 27.