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VARIABILITÉ CORRÉLATIVE.

miner chez l’élan mâle sa conformation actuelle, il est cependant présumable que les effets héréditaires de l’usage ont pris une part égale ou même supérieure au résultat définitif. À mesure que les cornes auront graduellement augmenté de poids, les muscles du cou avec les os auxquels ils s’attachent, seront devenus plus gros et plus forts, et auront réagi sur le corps et les membres ; ne perdons pas non plus de vue que, d’après l’analogie, certaines parties du crâne paraissent tendre tout d’abord à varier corrélativement avec les membres. L’accroissement du poids des cornes réagira aussi directement sur le crâne, de la même manière que lorsqu’on supprime un des os de la jambe d’un chien, l’autre, qui doit alors supporter le poids entier du corps, grossit rapidement. D’après les faits que nous avons déduits de l’étude du bétail à cornes et sans cornes, il est d’ailleurs probable que par suite de la corrélation qui existe entre le crâne et les cornes, ces deux parties doivent réagir directement l’une sur l’autre. Enfin, la croissance et l’usure subséquente des muscles et des os augmentés, doivent exiger un afflux plus considérable de sang, et par conséquent un supplément de nourriture qui, à son tour entraîne à un accroissement d’activité dans la mastication, la digestion, la respiration et les excrétions.

Corrélation entre la couleur et les particularités constitutionnelles. — La croyance à une connexion entre le teint et la constitution est déjà ancienne et est encore partagée actuellement par quelques-unes de nos meilleures autorités[1]. Ainsi le Dr Beddoe a montré par ses tableaux[2], qu’il y a quelque relation entre la disposition à la phthisie et la couleur des cheveux, des yeux et de la peau. On a aussi soutenu[3] que dans la campagne de Russie, les soldats de l’armée française provenant du midi, et ayant le teint foncé, supportaient mieux un froid

    à mesure que les facultés essentielles se multiplient et que le nombre des organes qui coopèrent à une fonction donnée augmente, l’équilibration indirecte par sélection naturelle devient de moins en moins propre à déterminer des adaptations spécifiques, et n’est capable seulement que de maintenir l’appropriation générale de la constitution aux conditions extérieures. » Cette opinion, que la sélection naturelle ne doit avoir que peu d’influence sur les modifications des animaux supérieurs, me surprend, lorsque je vois les effets incontestables que la sélection par l’homme a pu produire sur nos mammifères et oiseaux domestiques.

  1. Le Dr Lucas, O. C., t. II, p. 88–94, paraît contraire à cette manière de voir.
  2. British medical Journal, 1862, p, 433.
  3. Boudin, Géographie médicale, t. I, p. 406.