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VARIABILITÉ CORRÉLATIVE.

gallines, j’ai signalé que chez la race huppée, la touffe de plumes a probablement commencé par être petite, s’est agrandie sous l’action d’une sélection continue, et reposait alors sur une masse charnue ou fibreuse ; et que finalement s’agrandissant toujours, le crâne lui-même est devenu de plus en plus saillant, jusqu’à acquérir sa conformation extraordinaire actuelle. En corrélation avec ce développement du crâne, la forme et même les connexions réciproques des os maxillaires supérieurs et nasaux, la forme des ouvertures des narines, la largeur du frontal, la forme des apophyses postéro-latérales des os frontaux et écailleux, et la direction du méat osseux de l’oreille, ont toutes été modifiées. La configuration interne du crâne et celle du cerveau ont également été remarquablement altérées. Quant aux autres cas analogues relatifs aux races gallines, nous pouvons renvoyer aux détails que nous avons déjà donnés à leur sujet, à propos des saillies et dépressions qu’un changement de forme de la crête a, dans quelques races, et par corrélation, déterminées à la surface du crâne.

Chez notre gros bétail et nos moutons, il y a une connexion étroite entre les cornes, la grosseur du crâne et la forme des os frontaux ; ainsi Cline[1] a constaté que le crâne d’un bélier armé pèse cinq fois autant que celui d’un bélier inerme du même âge. Lorsque le bétail devient inerme, les os frontaux diminuent de largeur vers le sommet, et les cavités, entre les plaques osseuses, sont moins profondes, et ne s’étendent pas au delà des frontaux[2].

Arrêtons-nous un instant pour observer combien les effets de la variabilité corrélative, de l’augmentation d’usage des parties, et de l’accumulation par sélection naturelle des variations dites spontanées, peuvent dans bien des cas être inextricablement mêlés. J’emprunte à M. Herbert Spencer l’exemple du grand élan Irlandais, à propos duquel il fait remarquer que, lorsque cet animal a acquis ses bois gigantesques, pesant plus de cent livres, d’autres changements coordonnés avec celui-là sont devenus indispensables dans sa conformation, — à savoir : un crâne épaissi pour les porter ; un renforcement des vertèbres cervicales, ainsi que de leurs ligaments ; un élargisse-

  1. On the Breeding of Domestic Animals, 1829, p. 6.
  2. Youatt, On Cattle, 1834, p. 283.