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LOIS DE LA VARIATION.

et inférieures. Meckel a aussi fait remarquer[1] que, lorsque les muscles du bras s’écartent par le nombre ou la disposition de leur type normal, ils tendent presque toujours à imiter celui de la jambe, et que, inversement, les muscles de la jambe imitent, lorsqu’ils varient, la disposition de ceux du bras.

Dans plusieurs races distinctes de pigeons et de poules, les pattes et les deux doigts externes sont fortement emplumés, au point de ressembler à de petites ailes, chez le pigeon Tambour. Dans le Bantam à pattes emplumées, les plumes qui croissent sur le côté extérieur de la patte, et généralement des deux doigts externes, ont, d’après M. Hewitt[2], quelquefois dépassé en longueur les rémiges, et dans un cas avaient atteint jusqu’à une longueur de neuf pouces et demi ! M. Blyth m’a fait remarquer que ces plumes des pattes ressemblent aux rémiges primaires, et n’ont aucun rapport avec le duvet fin qui croît naturellement sur les pattes de quelques oiseaux, tels que le « Grouse » (tétras rouge) et le Hibou. On peut donc soupçonner que l’excès de nourriture ayant déterminé d’abord une surabondance du plumage, il s’est développé, en vertu du principe de la variation homologique, des plumes sur les pattes, et dans la position correspondante à celle qu’elles occupent sur l’aile, c’est-à-dire sur la face extérieure des tarses et des doigts. Le cas suivant de corrélation, qui, pendant longtemps, m’a paru inexplicable, semble confirmer cette manière de voir : dans les pigeons de toutes races, lorsque les pattes sont emplumées, les deux doigts externes sont toujours partiellement réunis par une membrane. Ces deux doigts externes correspondent au troisième et au quatrième ; or, dans l’aile du pigeon ou de tout autre oiseau, les premier et cinquième doigts sont entièrement atrophiés, le second est rudimentaire et porte ce qu’on appelle l’aile bâtarde, tandis que le troisième et le quatrième sont complétement enveloppés et réunis par la peau, formant ensemble l’extrémité de l’aile. Il en résulte que, dans les pigeons à pattes emplumées, non-seulement la face extérieure est garnie d’une rangée de longues plumes, comme les rémiges, mais les mêmes doigts qui, dans l’aile, sont complétement réunis par la peau, le deviennent partiellement dans

  1. Cité par I. G. Saint-Hilaire, Hist. des anomalies, t. I, p. 635.
  2. Poultry Book, par W. B. Tegetmeier, 1866, p. 250.