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LOIS DE LA VARIATION.

un certain point, s’accoutumer à un climat plus chaud ou plus froid que le leur, ce dernier cas étant celui qui a été le plus fréquemment observé.


Examinons maintenant par quels moyens l’acclimatation peut s’effectuer, soit par l’apparition spontanée de variétés douées d’une constitution différente, soit par les effets de l’usage ou de l’habitude. En ce qui concerne le premier mode, il n’y a point de preuves qu’un changement dans la constitution du produit soit en aucune relation directe avec la nature du climat habité par ses parents. Il est au contraire certain que des variétés robustes et délicates d’une même espèce peuvent apparaître dans le même pays. Les nouvelles variétés nées ainsi spontanément peuvent s’adapter de deux manières à des climats légèrement différents : premièrement, en ce qu’elles peuvent, soit jeunes soit adultes, résister à un froid intense, comme le poirier de Moscou, ou à une haute température, comme quelques Pelargoniums, ou avoir des fleurs qui supportent le gel, comme le poirier Forelle. Secondement, les plantes peuvent s’adapter à des climats fort différents du leur, par le seul fait qu’elles fleurissent et prennent leur fruit plus tôt ou plus tard dans la saison. Dans les deux cas, tout le rôle de l’homme dans l’acclimatation se borne à la sélection et à la conservation des nouvelles variétés. L’acclimatation peut encore s’effectuer d’une manière inconsciente, sans intention directe de la part de l’homme de s’assurer d’une variété plus robuste, simplement en élevant de graine des plantes délicates, et tentant occasionnellement de pousser leur culture de plus en plus vers le nord, comme cela a eu lieu pour le maïs, l’oranger et le pêcher.

La question de déterminer, dans l’acclimatation des animaux et des plantes, la part d’influence qu’on doit attribuer à l’hérédité de l’habitude, est beaucoup plus difficile à résoudre. Il est probable que, dans un grand nombre de cas, l’intervention de la sélection naturelle a dû compliquer le résultat. Il est évident que les moutons de montagne peuvent résister à des froids et à des tourmentes de neige qui anéantiraient les races des plaines ; mais comme les moutons montagnards ont été exposés ainsi de temps immémorial, tous les individus délicats ont dû être détruits, et les plus robustes seuls conservés. Il en est de même pour les vers à soie Arrindy de l’Inde et de la Chine ; mais qui peut préciser la part que peut avoir prise la