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DES CONDITIONS EXTÉRIEURES.

singulièrement épaissies, et enfin la masse centrale pleine de grains de fécule servant à la nourriture des larves.

Les galles sont produites par des insectes appartenant à divers ordres, mais le plus grand nombre d’entre elles sont l’œuvre d’espèces du genre Cynips. La discussion de M. Lacaze-Duthiers met hors de doute que la croissance de la galle ne soit causée par la sécrétion vénéneuse de l’insecte, car chacun sait combien est virulent le poison sécrété par les guêpes et les abeilles, qui appartiennent au même ordre que les Cynips. Les galles croissent avec une rapidité extraordinaire, et on dit qu’elles atteignent leur grosseur complète dans peu de jours[1] ; il est certain qu’elles sont presque complétement développées avant l’éclosion des larves. Un grand nombre de ces insectes étant extrêmement petits, la gouttelette de poison sécrété est aussi infiniment petite, et doit probablement agir sur une ou deux cellules seulement qui, étant anormalement stimulées, s’accroissent rapidement par une sorte de segmentation. Comme le remarque M. Walsh[2], les galles offrent des caractères définis et constants, chaque sorte conservant son type exact aussi bien qu’aucun autre être organisé indépendant. Le fait devient encore plus remarquable lorsque nous voyons que, par exemple, sur les dix sortes de galles qui se forment sur le Salix humilis, il y en a sept produites par des Cecidomyides, qui, quoique spécifiquement distinctes, se ressemblent au point que, dans la plupart des cas, il est difficile et quelquefois impossible de distinguer les uns des autres les insectes adultes[3]. D’après une analogie largement justifiée, nous pouvons admettre que le poison sécrété par des insectes si voisins ne doit pas beaucoup varier par sa nature ; il suffit cependant d’une aussi légère différence pour déterminer des résultats bien divers. Dans quelques cas, la même espèce d’insectes produit sur des espèces distinctes de saules des galles qu’on ne peut distinguer les unes des autres ; le Cynips fecundatrix a produit sur le chêne Turc, auquel il n’est point spécialement attaché, la même galle que sur le chêne Européen[4]. Ces faits

  1. Kirby and Spence, Entomology, 1818, vol. I, p. 459. — Lacaze-Duthiers, O. C., p. 281.
  2. Proc. Entom. Soc. Philadelphia, 1864, p. 558,
  3. Ibid., 1864, p. 633 ; et 1866, p. 275.
  4. Ibid., 1864, p. 411, 495, 545 ; 1866, p. 278.