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CIRCONSTANCES FAVORABLES.

Pendant la formation ou l’amélioration d’une race, on remarquera toujours une très-grande variabilité dans les caractères sur lesquels on porte spécialement l’attention, et dont on recherche ardemment le moindre perfectionnement pour s’en emparer et le propager. Ainsi, chez les pigeons Culbutants à courte face, la brièveté du bec, la forme de la tête et le plumage, — la longueur du bec et les caroncules du Messager, — la queue et son port chez les pigeons Paons, — la crête et la face blanche chez le coq Espagnol, — la longueur des oreilles chez les lapins, sont tous des points éminemment variables. Il en est de même dans tous les cas, et les prix élevés qu’on offre pour les animaux de premier ordre sont une preuve de la difficulté qu’il y a à les amener au plus haut degré de perfection. Ceci justifie l’importance des récompenses qu’on accorde pour les races hautement améliorées, comparées à celles qu’on délivre pour les races anciennes qui ne sont pas actuellement en voie d’amélioration rapide[1]. Nathusius fait une remarque semblable[2] à propos des caractères moins uniformes du bétail Courtes-cornes amélioré et du cheval anglais, comparés au bétail commun de la Hongrie et aux chevaux des steppes asiatiques. Ce défaut d’uniformité des points de l’organisation, qui subissent l’influence de la sélection, dépend surtout de l’énergie de la tendance au retour, mais aussi jusqu’à un certain point de la continuation de la variabilité des parties qui ont récemment varié. Nous devons nécessairement admettre cette continuité de la variation dans le même sens, car sans elle aucune amélioration dépassant un certain terme peu avancé de perfection ne serait possible ; or nous savons que cela n’est pas généralement le cas.

Comme conséquence de la variabilité continue, et plus spécialement du retour, toutes les races hautement améliorées dégénèrent rapidement, si on les néglige et si on cesse de leur appliquer la sélection. Youatt en donne un exemple frappant à propos d’un bétail tenu autrefois dans le Glamorganshire, et qui n’avait pas été nourri d’une manière suffisante. Dans son traité sur le cheval, M. Baker conclut que dans toutes les races, la dégénérescence sera proportionnelle à la négli-

  1. Cottage Gardener, Déc. 1855, p. 171. — Janv. 1856, p. 248, 323.
  2. Ueber Shorthorn Rindvich, 1837, p. 51.