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HÉRÉDITÉ.

d’un magnifique bouleau pleureur (Betula alba) ont crû, au Jardin botanique d’Édimbourg, parfaitement droit pendant les dix ou quinze premières années et sont ensuite devenues toutes pendantes comme la plante mère. Un pêcher, à branches pendantes comme celles d’un saule pleureur, s’est aussi propagé par graines[1]. Enfin, un if pleureur (Taxus baccata) fut trouvé dans une haie dans le Shropshire ; c’était une plante mâle, mais dont une branche portait des fleurs femelles ; les baies provenant de celles-ci semées ensuite, donneront dix-sept plantes, toutes semblables par leur habitus à celle dont elles provenaient[2].

Ces faits semblent indiquer une transmission assez constante du facies pleureur, mais en voici la contre-partie. M. Mac Nab[3] ayant semé des graines du hêtre pleureur (Fagus sylvatica), n’en obtint que des hêtres ordinaires. Sur ma demande, M. Rivers leva de graine quelques plantes de trois variétés distinctes de l’ormeau pleureur, dont l’un au moins était situé de façon à ne pouvoir être croisé par aucun autre ormeau, et cependant aucun des jeunes arbres, quoique ayant atteint deux pieds de hauteur, n’a montré la moindre tendance à avoir les branches pendantes. M. Rivers avait semé autrefois environ vingt mille graines du frêne pleureur (Fraxinus excelsior), sans voir lever une seule plante présentant ce caractère ; et M. Borchmeyer, en Allemagne, a obtenu le même résultat sur un semis d’un millier de graines. D’autre part, M. Anderson, au Jardin botanique de Chelsea, a levé plusieurs arbres pendants de la graine d’un frêne pleureur qui avait été trouvé vers 1780 dans le Cambridgeshire[4]. Le professeur Henslow m’apprend qu’au Jardin botanique de Cambridge quelques plantes provenant de la graine d’un frêne pleureur avaient d’abord présenté le même aspect, mais s’étaient ensuite complètement redressées ; il est probable que cet arbre, qui transmet jusqu’à un certain point son caractère pleureur, a dû provenir de la même souche originale du Cambridgeshire, tandis que d’autres frênes pleureurs peuvent avoir une origine différente. Mais le cas qui montre le mieux combien est capricieuse l’hérédité du caractère pleureur chez les arbres, est le suivant, qui m’a été communiqué par M. Rivers, et est relatif à une variété d’une autre espèce de frêne, le Fraxinus lentiscifolia. Cet arbre, âgé d’environ vingt ans, et autrefois pleureur, avait depuis longtemps perdu cet habitus, car toutes ses branches étaient complètement redressées ; mais des plantes qui avaient précédemment été levées de sa graine, étaient complètement pendantes, leurs tiges ne s’élevant pas à plus de deux pouces du sol. Ainsi la variété pleureuse du frêne commun, dit M. Rivers, qui a pendant fort longtemps été propagée par bourgeons, et cela sur une grande échelle, n’a pas pu transmettre son caractère à une plante sur vingt mille, tandis que la variété pleureuse d’une seconde espèce de frêne, qui n’a pas pu, plantée dans le

  1. Bronn, Geschichte der Natur, vol. II, p. 121.
  2. Rev. W. A. Leighton, Flora of Shropshire, {pg|497}}. — Charlesworth, Magaz. of Nat. Hist., vol. I, 1837, p. 30.
  3. Verlot, O. C., p. 93.
  4. Pour ces divers faits, voir Loudon’s Gardener’s Magazine, vol. x, 1834, p. 180, 408 ; — et vol. IX, 1833, p. 597.