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SÉLECTION.

cultive que pour leurs feuilles produisent également des graines un peu différentes. Généralement, en vertu de la loi de corrélation, quand une variété diffère beaucoup des autres par un caractère, elle en diffère jusqu’à un certain point par plusieurs autres. J’ai observé ce fait en cultivant ensemble un grand nombre de variétés d’une même espèce, car, dressant successivement des listes des variétés qui différaient le plus par leur feuillage et leur mode de croissance, puis par leurs fleurs, leurs capsules, et enfin par leurs graines mûres, je trouvai ordinairement que les mêmes noms se représentaient dans deux, trois ou quatre de mes listes. Mais les plus fortes différences portaient toujours, autant que j’ai pu en juger, sur les organes pour lesquels la plante est spécialement cultivée.

Si nous songeons que toute plante a dû être en premier cultivée par l’homme en raison de l’utilité qu’elle pouvait avoir pour lui, que ses variations n’ont été qu’une conséquence souvent très-postérieure de la culture, nous ne pouvons pas expliquer la plus grande diversification des parties les plus recherchées, par la supposition que l’homme ait primitivement choisi les espèces ayant une tendance spéciale à varier dans une direction particulière. Le résultat ne peut être attribué qu’au fait que les variations de ces parties ont été successivement conservées, et ainsi continuellement accumulées, tandis que les autres variations ont été négligées et se sont perdues, à l’exception de celles qui, par corrélation, accompagnaient les premières. Nous pouvons en inférer qu’on pourrait, par une sélection prolongée, arriver à créer des races aussi différentes sur un point de conformation quelconque, que le sont, par leurs caractères utiles et recherchés, celles qu’on cultive actuellement.

Nous remarquons quelque chose d’analogue chez les animaux, bien qu’ils n’aient pas été domestiqués en assez grand nombre, ni fourni assez de variétés pour une bonne comparaison avec les plantes. Chez les moutons, on recherche la laine ; aussi diffère-t-elle dans les diverses races bien plus que le poil chez le gros bétail. On ne demande aux moutons, chèvres, bêtes à cornes et porcs, ni force ni agilité, aussi ne possédons-nous pas de races différant sous ce rapport entre elles, comme le cheval de course et celui de trait. Mais ces qualités sont