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CHEZ LES ANCIENS.

c’est par une sélection attentive que ce résultat a été obtenu, en déterminant régulièrement la densité des racines, et en réservant les meilleures pour la production de la graine[1].

De la sélection chez les peuples anciens et à demi civilisés. — En attribuant autant d’importance à la sélection des animaux et des plantes, on peut objecter que la sélection méthodique n’a pas dû être pratiquée anciennement, et un naturaliste distingué a prétendu qu’il serait absurde de supposer qu’elle ait pu l’être par des peuples à demi civilisés. Il est sans doute certain que le principe de la sélection a été reconnu et pratiqué sur une beaucoup plus grande échelle dans ces cent dernières années, qu’à aucune époque antérieure, et a produit des résultats en conséquence ; mais ce serait une grande erreur, comme nous allons le voir, de supposer qu’on n’ait pas reconnu son importance à une époque plus ancienne, et qu’elle n’ait pas été employée par des peuples à demi civilisés. Je dois dire qu’un bon nombre des faits que je vais signaler montrent seulement qu’on prenait des soins pour la reproduction, mais quand cela a lieu, il est presque sûr que la sélection intervient dans une certaine mesure. Nous serons plus tard mieux à même de juger jusqu’à quel point, même pratiquée occasionnellement et seulement par quelques habitants d’un pays, la sélection peut, à la longue, produire des résultats importants.

Dans un passage célèbre du trentième chapitre de la Genèse, se trouvent indiquées des règles pour influencer, ce qu’on croyait alors possible, la couleur des moutons ; et les races foncées ou tachetées sont mentionnées comme ayant été maintenues séparées. Au temps de David les toisons étaient comparées à la neige. Youatt[2], qui a discuté tous les passages de l’Ancien Testament se rapportant à la reproduction, conclut qu’à cette période primitive, plusieurs des principes essentiels de l’élevage ont dû être connus et pratiqués avec suite. Selon Moïse, il était commandé « de ne pas laisser le bétail engendrer avec une autre sorte ; » mais comme on achetait des mulets[3], il faut qu’à cette époque reculée d’autres nations aient dû croi-

  1. Godron, O. C., 1859, t. II, p. 69. — Gardener’s Chronicle, 1854, p. 258.
  2. On Sheep, p. 18.
  3. Volz, Beiträge zur Kulturgeschichte, 1852, p. 47.